KrISS feed 8.9 - Un simple et superbe (ou stupide) lecteur de flux. Par Tontof
  • Sunday 04 February 2024 - 10:07
    Quelle bonne idée. Pour son nouveau programme "Bienvenue au monastère", C8 a proposé à six personnalités de vivre dans un endroit "hors du temps, sans téléphone, sans réseaux sociaux, sans mail" pour "se reconnecter à soi-même". Car on le sait tous, "dans un quotidien ultra connecté, il est parfois difficile de faire une pause". Et pour mettre en scène cette retraite, les équipes de Bolloré n'ont rien trouvé de mieux que de mettre en avant deux communautés religieuses ayant un lourd passif de violences sexuelles et dérives sectaires. Et qu'importe les nombreux articles de presse qui auraient dû plomber le programme, c'est un succès d'audience : près de 500 000 téléspectateurs suivent l'émission tous les vendredis. Un programme qui, sous des allures de pseudo-téléréalité, marque une nouvelle étape dans l'évangélisation voulue par Saint Vincent Bolloré.

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  • Saturday 03 February 2024 - 11:15
    Le 21 février prochain, Missak Manouchian et sa femme Mélinée feront leur entrée au Panthéon. Capturé en novembre 1943 avec son groupe, le résistant Manouchian est jugé avec 23 de ses compagnons en février 1944, condamné à mort et exécuté le 21 février 1944. De leur procès mis en scène par les Nazis à aujourd'hui, Manouchian et les FTP-MOI ont été tour à tour rejetés, glorifiés, célébrés, instrumentalisés.

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  • Saturday 03 February 2024 - 10:18
  • Friday 02 February 2024 - 21:17

    Dans le cadre de l'appel international à des journées d'actions contre Lafarge et le monde du béton, des militants se revendiquant des Soulèvements de la terre du Furan ont mené une action de désarmement (et non pas de réarmement) le dimanche 21 janvier sur le site Lafarge rue Jean Huss à Saint-Étienne.

    Faut-il encore prouver la légitimité de nos actions ? En ce début de XXIe siècle, la crise climatique et les perspectives d'avenir tragiques qui l'accompagnent ne relèvent plus de la croyance, mais de l'évidence. La science mesure la dégradation des écosystèmes, la perte de biodiversité, elle prévoit aussi les conséquences désastreuses du réchauffement climatique que nos activités ne cessent d'empirer. Nous ne pouvons plus ignorer notre responsabilité face à la destruction du vivant. En tant qu'humanité, les systèmes que nous encourageons ne sont plus seulement criminels, ils deviennent suicidaires. Nous appartenons au vivant que nous sommes en train de détruire. Ainsi c'est à une perte totale de sens que nous assistons. À l'heure de la catastrophe, à quoi bon continuer ?

    On entend beaucoup que les militant‧es écologistes incarneraient « la nature qui se défend ». Peut-être y a-t-il en cet endroit une nuance à apporter. Il ne s'agit pas de nous proclamer les portes-parole d'une nature qui serait sans voix. Lorsqu'une forêt brûle, qu'une espèce s'éteint, qu'un glacier disparait, c'est déjà un langage, c'est déjà un avertissement que nous sommes toutes et tous en mesure de comprendre.

    Nous ne savons pas mieux, nous ne sommes pas plus clairvoyant‧es, nous avons simplement fait un choix : celui de ne plus accepter que cette voix ne soit pas entendue. Dans une posture d'humilité, nous avons choisi de mettre nos discours et nos actes au service du vivant dans son ensemble, en connaissance des risques encourus.

    Le discours qui voudrait montrer les militant‧es écologistes comme des marginales‧aux se dressant contre le reste du monde est faux. Une telle dichotomie n'existe pas. Nous sommes toutes et tous concerné‧es, et si nous en appelons à la responsabilité collective pour essayer de limiter les dégâts, nous en appelons surtout à la responsabilité de quelques-uns, ceux qui décident, qui possèdent le pouvoir, et qui ont par-là la possibilité de permettre un changement radical.

    Nous ne sommes que des lanceur‧euses d'alertes. Mais que faire lorsque nos revendications ne sont pas écoutées ? Quelles armes reste-il une fois les discours épuisés ? Face aux choix délibérément climaticides de nos dirigeants, il ne nous reste que l'action directe.

    Ce sont des tentatives de résistance, qui fleurissent à travers le monde et s'emploient à mettre à mal un système qui nous mène au désastre. Ainsi, alors qu'ils essayent de nous soumettre par la peur et la répression, nous en appelons à une justice qui dépasse le cadre de la loi, car il est aujourd'hui légal pour les grandes entreprises de compromettre les conditions de vie sur Terre.

  • Friday 02 February 2024 - 17:01
    Une partie des propos de Xavier Niel, longuement interviewé dans l'émission "Tech&Co", ont été coupés par BFM Business. Quelles ont été les phrases de trop, prononcées par le patron de Free ? Une boutade sur l'ancien PDG de SFR. Et un bref passage au cours duquel le journaliste demande à Xavier Niel s'il serait candidat au rachat de SFR, propriété de Patrick Drahi, également propriétaire de BFMTV.

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  • Thursday 01 February 2024 - 17:49

    Le Vendredi 9 février, à la Dérive, 91 rue Antoine Durafour. Projection du film « The Lab » (Y. Feldman, 2013,60 mn). Bien que produit il y a dix ans, ce film montre les coulisses de l'industrie de l'armement. Dans le contexte particulièrement cynique où les armes sont « testées » sur place, les vendeurs se félicitent de leur capacité d'export.

    18h : accueil + table de presse
    19h : petit buffet prix libre
    20h:projection du film + discussions autour de l'industrie de l'armement.

    La Dérive, 91 rue Antoine Durafour.

  • Thursday 01 February 2024 - 17:46

    Repas de soutien à l'association de sport populaire Le Sport Autrement, présentation du projet d'achat d'un nouveau local.
    Nous vous proposons de passer un moment convivial (en dehors du tatami) et de cuisiner et manger ensemble.

    9h30 cuisine participative
    12h30 repas partagé

    Tout cela à prix libre à la cantine participative LA TABLÉE (5 rue Robert,42000 Saint-Étienne).

    Inscriptions avant le mercredi 7 février (par message ou à la salle).

    C'est du sport... Mais pas seulement !

    lesportautrement42 chez gmail.com
    https://www.adminlsa.fr/LSA/public/
    https://www.helloasso.com/associations/dojo-vivaraize/collectes/sport-autrement

  • Thursday 01 February 2024 - 17:44

    Ca lui suffisait pas d'être chef des flics, voilà que notre préfet fricotte avec les bidasses.

    Il fallait accueillir comme il se doit Denis Mistral, général de corps d'armée, en goguette dans le coin. Alors quoi de mieux que de convier des industriels de la Loire à la Cité du Design pour se faire un relais du Réarmement en Marche (cadencée).

    En effet, comme nous le dit France Bleu :

    « il y a des perspectives pour les entreprises de la Loire dans le domaine de l'économie et l'industrie de guerre », c'était le message passé ce vendredi 26 janvier 2024 à environ 140 entreprises locales réunies à la Cité du Design de Saint-Étienne. (France Bleu Loire)

    Ou encore :

    « On a décidé de mettre en place l'économie de guerre à la fois pour le matériel mais aussi pour les munitions. Il y a énormément d'opportunités. »

    Il n'y a même plus besoin d'être expert.e en novlangue pour lire entre les lignes, puisqu'on nous le dit déjà clairement : la guerre ça rapporte.
    Et c'est bien pour ça que tout ce beau monde de l'industrie se frotte les mains de semer mort et destruction (les perspectives) grâce aux guerres (les opportunités) partout dans le monde.

    Notons au passage qu'en plus de vouloir mobiliser la Base Industrielle et Technologique de Défense (BITD : les entreprises qui travaillent pour l'industrie de défense), il faut aussi mobiliser les corps et les esprits. C'est pourquoi le charmant Denis Mistral (dont la devise quand il était dans la légion était « commander en père, obéir en fils » [1]) était à Lyon la veille pour signer avec le groupe Vicat, la société Acti, BioMérieux, l'école EM Lyon, le Medef Lyon-Rhône et la CBS.School, six conventions de partenariat de soutien à la réserve opérationelle. Toujours pas besoin de traduction puisque le Progrès nous dit tout :

    L'Armée se félicite d'une « démarche citoyenne [qui] favorise l'intégration au sein de la reserve opérationelle des salariés, fonctionnaires, étudiants souhaitant s'engager pour la nation. L'objectif est d'atteindre le doublement des reserves opérationnelles voulu par le président de la République. »

    Mais revenons à la Cité du Design. Pourquoi réunit-on dans ce lieu où l'on fabrique d'innocentes chaises à trois pieds et des lampes en plastique fondu, la fine fleur des généraux et des marchands de canons ?

    On pourrait faire tout un dossier sur les 150 ans d'histoire de la Manufacture d'Armes de Saint-Étienne, mais concentrons-nous pour l'instant sur les dernières années. L'actuelle Cité du Design abritait, jusqu'en 2001, le GIAT, devenu Nexter, fabricant de canons (Caesar) et marchands de mort à travers le monde. En fermant ses portes localement [2], Nexter nous a quand même laissé deux rejetons qui travaillent encore pour l'armée sur place !
    Il s'agit de OPTSys et de NBCSys, filiales spécialisées dans les protections Nucléaire, Bactériologique, Chimique et dans l'optique.

    La Cité du Design, c'est aussi l'endroit où l'on trouve le laboratoire Hubert Curien, créé sous l'impulsion de Thales Saint Heand, une filiale de Thales qui, comme on le sait, mange à tous les rateliers [3] puisqu'elle vend des drônes et du matériel à Israel, fournit des batteries anti-aériennes à l'Ukraine tout en ayant vendu du matériel de visée nocturne à l'armée...russe.

    Le labo Hubert Curien travaille donc avec Thales, mais aussi avec Airbus Defense, le Commissariat à l'Energie Atomique, la Direction Générale de l'Armemement, et STMicroElectronics (épinglée pour pomper l'eau de Grenoble [4] mais aussi pour ses ventes de materiel à la Russie). Pas mal de labos et d'entreprises qui font donc leur beurre sur « l'innovation de défense », et comme le dit encore le gouverneur militaire de Lyon [5] :

    « On peut penser aux drones, à la robotique et bien sûr à l'intelligence artificielle aux conséquences assez importantes dans notre domaine aussi bien sûr »

    .

    Ce rapide tour d'horizon mortifère de la Cité ne donne pas la nausée à tout le monde. C'est aussi ici qu'un start-upeur [6] a décidé de monter la Fabuleuse Cantine, solidaire et éthique, en même temps qu'une autre boite a lui : Serenicity, qui a tenté de vendre à la ville de Saint-Étienne des micros à mettre dans les rues, en plus des caméras. Un des actionnaires de cette boite n'est autre que Verney-Carron, célèbre vendeur d'armes qui compte bien se refaire une santé avec toutes ces « opportunités » !
    Mais nous sommes sorti.es de la zone. Verney-Carron n'est pas dans la Cité, mais juste à coté, de l'autre côté du boulevard au doux nom d'Adolphe Thiers.

    Conclusions provisoires :
    La guerre a toujours fait des heureux.
    Les dirigeants sont ravis de voir un peuple marcher à la baguette, par un « réarmement civique » passant par les réserves opérationelles, l'uniforme à l'école ou le SNU pour les jeunes de 15 à 17 ans.
    Les industriels s'en mettent plein les poches en vendant à tire-l'arigot leurs engins de mort.
    Les scientifiques recherchent « pour la science ».
    La Cité du Design abrite encore ces engeances qui ne voient que les « perspectives et opportunités » de faire crever les gens.

    Chair à patron, chair à canon, le réarmement démographique voulu par Macron (comme par n'importe quel chef d'Etat en guerre) montre bien son visage patriarcal et autoritaire.

    Ne les laissons pas réaliser leurs profits sur notre dos !

    Leurs guerres, nos morts !


    [1] Voir le dossier « Le mâle » du magazine réac Causeur : https://www.causeur.fr/wp-content/uploads/2021/03/CA_02032021.pdf

    [3] dans le langage économique, on dit « innover sur tous les fronts »

    [5] Il s'agit aussi de ce bon vieux Denis Mistral qui a visiblement plein de casquettes en plus de la Légion d'Honneur

    [6] Un dossier du Couac nous en parlait ici

    A vérifier, mais d'après l'image de l'article de IF Saint-Étienne :
    https://i0.wp.com/www.if-saint-etienne.fr/wp-content/uploads/2024/01/esign-IF-250.png

    il semblerait que la petite sauterie ait eu lieu dans un amphi de l'Ecole du Design, qu'on pourrait confondre avec la Cité du Design puisque les deux structures ont été fondues en EPCC avec un seul chef (Eric Jourdan). Quoiqu'il en soit, cela veut dire qu'il y a forcément eu des profs au courant de cette réunion de requins !

  • Thursday 01 February 2024 - 17:39
    Alors que Nestlé prend connaissance d’une enquête à paraître de Radio France et du "Monde" qui révèle que pendants des années, et avec la complicité du gouvernement, l’entreprise a eu recours à des traitements interdits sur ses eaux minérales, elle orchestre un coup de comm’ pour minimiser l’affaire en se servant des "Échos" pour faire son "mea culpa".

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  • Thursday 01 February 2024 - 15:51

    Alors que le marché de l’impression 3D continue d’évoluer à un rythme effréné, Bambu Lab se distingue comme un acteur clé. Son arrivée a permis de faire un bon en avant, notamment sur la vitesse d’impression. En 2024, les imprimantes…

    Cet article Comparaison des imprimantes 3D Bambu Lab en 2024 est apparu en premier sur Makershop.

  • Thursday 01 February 2024 - 11:12
  • Thursday 01 February 2024 - 00:30

    Né à Saint-Étienne en 1837, Étienne Faure participe en 1868 à la grève des cordonniers. En 1871, il milite au Club de la rue de la Vierge, à Saint-Étienne, centre des révolutionnaires animés de l'esprit de l'Internationale. Il jouera un rôle de premier plan lors de la commune de Saint-Étienne. Anarchiste infatigable, il est contraint à l'exil et sera condamné lors du « Procès des 66 » à Lyon. Quand il meurt à Saint-Étienne, le 1er février 1911, des camarades se cotisent pour acheter un cercueil à celui qui, durant une longue vie, s'en était allé « tout de bitors en faisant son droit chemin ».

    Biographie d'Étienne Faure alias « Cou-Tors »

    Né le 23 août 1837, mort le 1er février 1911 à Saint-Étienne (Loire) ; cordonnier et marchand ambulant ; anarchiste et membre de la Commune à Saint-Étienne (Loire).

    Sans doute Étienne Faure est-il le dénommé Faure qui, en novembre 1867, présenta le projet de constitution de la société des ouvriers cordonniers pour la confection de la chaussure, et qui dirigea la grève des cordonniers de 1868. Sans doute Étienne Faure fut-il encore le dénommé Faure qui, en février 1870, fut l'un des fondateurs du Cercle des travailleurs où dominaient les libres penseurs [1].

    Quoi qu'il en soit, au début de 1871, Faure militait au Club de la rue de la Vierge, à Saint-Étienne, centre des révolutionnaires animés de l'esprit de l'Internationale. Le 24 mars, après avoir, avec l'aide de quatre gardes nationaux, fait cesser le travail à la Manufacture d'armes, il faisait partie de la délégation qui se rendit à l'Hôtel de Ville, fit procéder à l'arrestation des autorités municipales et constitua le comité insurrectionnel. Faure reçut le poste de commissaire central de police municipale qu'il occupa pendant trois jours. À ce titre, il fit placarder une affiche appelant le peuple au calme en attendant l'élection d'une Commune [2]. Il échappa aux autorités militaires qui réoccupèrent l'Hôtel de Ville et s'enfuit à Genève. La cour d'assises de Riom le condamna par contumace, le 29 février 1872, à la déportation dans une enceinte fortifiée.

    En exil à Genève, il fit partie de la Société des réfugiés et de la Fédération jurassienne. En 1872, il fit paraître une brochure - La Commune en province - dans laquelle il s'exprima sans ménagements sur le compte de quelques-uns de ses compagnons, Durbize et Jolivalt, qui « ont bien mérité de la bourgeoisie stéphanoise » [3]. Dans cette même brochure, au procureur qui s'était moqué de ses fautes d'orthographe, il écrivait : "Certes, Monsieur le procureur, si j'avais eu, comme vous, dans la poche de mes parents, des milliers de francs produits par la sueur des travailleurs, j'aurais peut-être pu apprendre, moi aussi, l'art des fioritures et je connaîtrais probablement la place que doit occuper chaque lettre dans le corps des mots ; mais n'ayant pas de ressources, j'ai dû commencer à travailler bien jeune au lieu d'aller à l'école. Est-ce à dire que vous valez plus que moi avec votre instruction ?" Et un peu plus loin, il ajoutait : " Souvenez-vous toutefois que ma haine pour vous est égale au mépris, je veux dire au dégoût que vous m'inspirez. Souvenez-vous surtout que celui que vous injuriez est au dessus de vous et qu'il y a une grande distance entre Faure Cou tordu et un procureur... de l'espèce française. Faure appartient à la classe des travailleurs honnêtes. Il jouit de l'estime et de la considération de tous les honnêtes gens qui le connaissent. On ne saurait en dire autant de vous, Monsieur le procureur, de vous qui remplissez des fonctions serviles, de vous enfin - comme l'a fort bien dit Rochefort - qui faites partie de cette Valetaille qu'on appelle la magistrature française".

    Le 8 mai 1879, sa peine fut commuée en celle de six ans de bannissement, et, le 13 mars 1880, il bénéficia de la remise du reste [4].

    Dès octobre 1880, des rapports signalaient sa présence dans les réunions politiques radicales et socialistes, et il militait au Cercle des travailleurs, fondé en avril 1877, qui groupait surtout les ouvriers du bois. En novembre 1880, il protesta parce qu'on ne l'avait pas inscrit sur les listes électorales. Le 10 octobre 1881, il fit une conférence sur le socialisme au cercle de l'Union des travailleurs et il y exposa sa conception d'un collectivisme antiparlementaire à réaliser par la Révolution [5]. Le 17 avril 1882, à une réunion des comités radicaux-socialistes, il demandait la suppression du budget de la police.

    Il avait repris son métier de cordonnier et il vendait les journaux révolutionnaires - Le Droit social, L'Etendard révolutionnaire, La Bataille, Le Prolétaire... - à son domicile, 18, Petite rue Saint-Jacques, qui servait de rendez-vous et même de lieu de réunion aux éléments anarchistes de Saint-Étienne, notamment au groupe Les Outlaws. Il était également le dépositaire des produits pharmaceutiques de la maison Raspail.

    En août 1882, il fut mandaté par le groupe Les outlaws et le groupe La Jeunesse Stéphanoise anarchiste dont il était membre et qui se réunissait à son domicile pour les représenter au congrès international tenu à Genève [6]. Lors de son arrestation et de son interrogatoire en décembre 1882, il affirma avoir refusé ce mandat et n'être pas allé à Genève.

    En octobre 1882 il fut l'objet de plusieurs perquisitions, ainsi que le 19 novembre 1882 où la police avait saisi à son domicile 23 exemplaires du journal Le Révolté, des listes d'adhérents et de la correspondance (avec Bordat, Emile Gautier, une lettre qu'il attribua lors de son interrogatoire à Louise Michel), ce qui lui valut d'être arrêté - comme Ricard et Regis Faure - , incarcéré à la prison de Bellevue puis transféré à Lyon et inculpé dans le procès dit des 66, pour affiliation à l'Internationale anarchiste. Il refusa de signer les procès verbaux de ses interrogatoires. Il fut condamné, le 13 mars 1883, par la cour d'appel de Lyon, à deux ans de prison, cinq ans de surveillance et cinq ans de privation de ses droits civiques [7].

    À la fin de sa détention à Clairvaux, il demanda à se rapprocher de sa mère âgée et sans ressources qui habitait encore à Saint-Étienne. Malgré l'opposition de la police qui craignait qu'il ne reconstituât des groupes internationalistes, il lui fut permis de se fixer au Creux, près de Saint-Chamond, en résidence surveillée. Revenu par la suite à Saint-Étienne, il reprit contact avec les anarchistes et il diffusa de nouveau leur presse.
    A la mi février 1887, suite aux attentats contre le Palais de justice de Lyon, et comme une vingtaine de compagnons de la région, il avait été l'objet d'une perquisition qui n'avait donné aucun résultat.

    Le 30 avril 1890, il protesta contre les arrestations et contre l'occupation de la Bourse du Travail par la force publique [8].

    En 1892, avant le procès de Ravachol, il était marchand ambulant, rue du Treuil, à Saint-Étienne, et il fut encore arrêté avec Régis Faure et Ricard. Le 28 mars 1892, comme 13 autres militants, son domicile, 36 rue de Roanne, avait été l'objet d'une perquisition. Le 22 avril suivant, comme de très nombreux militants tant à Paris qu'en banlieue et en province, il fut arrêté préventivement à la manifestation du 1er mai et poursuivi pour « association de malfaiteurs » avant de bénéficier d'un non lieu en juin...

    Deux ans plus tard, il habitait, 3, rue de Marengo, et exerçait toujours la même profession. L'année suivante il se livra à des interventions humoristiques dans les réunions électorales du parti socialiste, prêcha l'abstentionnisme, posa des affiches du Libertaire signées : le candidat abstentionniste Étienne Faure. Il en posa même une rédigée par ses soins [9].

    Mandat d'Étienne Faure pour le congrès de Genève

    Dépositaire des Temps Nouveaux de Jean Grave, il poursuivit sa propagande de multiples façons, dirigeant des chœurs d'enfant au cours d'une soirée chantante organisée par les compagnons (août 1897), proposant vers 1900-1901 la constitution d'une association de défense des locataires « contre la rapacité des propriétaires » avec déménagements à la cloche de bois, participant à une campagne antimilitariste en 1905. Bref, toujours très actif, il ne cessa de figurer sur les listes d'anarchistes à surveiller.

    Devenu vieux, Étienne Faure, s'asseyait sur une chaise, place du Peuple, vendait du poil à gratter ou la formule de l'eau sédative Raspail, et il lui arrivait de distribuer quelques couplets ou impromptus de sa composition : "Dansons la farandole, vive le son, vive le son ! Dansons la farandole, vive le son du pognon !".

    « Ses états de services politiques, sa verve gouailleuse, son esprit inventif » avaient fait d'Étienne Faure « le type le plus populaire de Saint-Étienne ». Il fallait voir dans les concerts de famille avec quelle bonne humeur et quel entrain il organisait des rondes enfantines qu'il dirigeait « magistralement pour la plus grande joie des enfants ... et des parents, et cela, avec des chansons de Béranger ». Ainsi s'exprime à son sujet J.F. Gonon dans son Histoire de la chanson stéphanoise et forézienne.

    Quand il mourut à Saint-Étienne, le 1er février 1911, des militants et amis se cotisèrent pour acheter un cercueil à celui qui, durant une longue vie, s'en était allé « tout de bitors [10] en faisant son droit chemin ».

    OEUVRES : La Commune en province. Un condamné par la cour d'assises de Riom devant l'opinion publique, Genève, 1872. 29 p. — Au citoyen Garibaldi, 4 p. imprimées, Genève, 27 janvier 1875. (E. Faure figure parmi les 54 signataires.) Cet écrit se trouve à l'IFHS (archives Claris).


    [1] Arch. Dép. Loire 19 M II et 27 M I

    [2] le texte de cet appel a été reproduit par Petrus Faure dans son Histoire du Mouvement ouvrier dans le département de la Loire, Saint-Étienne 1956, p. 187

    [3] cité par M. Vuilleumier, « Les Proscrits de la Commune en Suisse, 1871 », Revue suisse d'histoire, t. XII, fasc. 4, 1962, pp. 509-510

    [4] Arch. Dép. Loire, 10 M 78 et 19 M 1

    [5] Arch. Dép. 10 M 77 et 78

    [6] voir portfolio

    [7] Arch. Dép. Loire, 10 M 79 et Le Procès des anarchistes devant la police correctionnelle et la cour d'appel de Lyon, Imprimerie nouvelle, Lyon, 1883

    [8] Arch. Dép. Loire, 10 M 80 et 86

    [9] Arch. Dép. Loire 10 M 112

    [10] De bitors : de travers, tordu en Gaga (le parler stéphanois)

    Sources : Arch. Nat., BB 24/863, n° 6144. — Arch. Dép. Loire : dossiers énumérés ci-dessus et, d'une façon générale, séries 10 M et 19 M.= Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier..., op. cit. // AD Loire 1M528// Le Père Peinard, 8 mai 1892 // Arc. Nat. F7/12504, BB 186452 // AD Rhône 2U433, 4M306 //

    Biographie d'Étienne Faure alias « Cou-Tors » dans militants-anarchistes.info

  • Wednesday 31 January 2024 - 15:09
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  • Wednesday 31 January 2024 - 14:24

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  • Tuesday 30 January 2024 - 22:48

    Deux articles publiés sur les sites mutu alter-vienne.info et ricochets.cc.

    La Confédération paysanne bloque le péage !

    Depuis près de deux semaines, le monde agricole exprime sa souffrance et ses inquiétudes en France, tout comme l'ont fait les autres pays européens, en particulier l'Allemagne et l'Espagne. Le syndicat minoritaire qu'est la Confédération paysanne n'est pas en reste et entend être audible dans le discours ambiant de la FNSEA écocidaire et libérale.

    Les flics nous avaient tout préparé

    Le rassemblement était prévu à 8h au Super U de la Verpillère, les paysan.nes sont donc parti.es tôt ce matin. Au volant des tracteurs, beaucoup de femmes, une des spécificités de la Confédération Paysanne (CP) qui milite pour plus d'égalité dans le monde agricole.
    Tracteurs, voitures et vélos ont convergé après 9h vers le péage autoroutier déjà fermé et sécurisé par les forces de l'ordre.
    “On veut rester au moins 24h, nous dit une militante, mais la déclaration de manifestation court jusqu'à jeudi 16h, on va voir combien pourront rester jusque-là.”

    Pas facile en effet de quitter sa ferme pour manifester, surtout les éleveureuses qui ont parfois envoyé des proches à leur place, c'est le cas de cet agriculteur à la retraite, venu en voisin représenter son fils : “il a trop de boulot”, confie t-il.

    Une des revendications de la CP est d'avoir une réelle protection sociale qui permette aussi d'être remplacé.e et indemnisé.e sur son exploitation quand cela est nécessaire (maladie, congés, retraite...).

    Les manifestant.es étaient environ 200 sur place, la majorité syndiquée à la Confédération Paysanne mais aussi quelques associations et syndicats (France Nature Environnement, Greenpeace, la CGT, Solidaires).

    Plusieur.e.s représentant.e.s de la CP en AURA ont pris la parole pour rappeler les revendications communes mais aussi les divergeances avec la FNSEA :

    Deux points d'accord existent avec les autres syndicats agricoles

    • Refuser et lutter contre les traités de libre echange par exemple celui qui permet les importations de viande ovine depuis la Nouvelle-Zélande.
    • Garantir un prix minimum pour l'entrée des produits sur le territoire pour casser la concurrence faussée de pays où le droit du travail et les normes environnementales ne sont pas respectées. Ce prix minimum permettra de rémunérer les produteurices et leur offrir une protection sociale.

    Mais aussi des divergences

    La CP condamne la plupart des demandes au gouvernement de la FNSEA comme le "concours Lépine des idées liberales". En effet, une agriculture est possible sans pesticides ni glyphosate tout en respactant les normes sociales et environnementales.

    La suite de cet article à lire sur le site alter-vienne.info.

    A43 : péage bloqué par la Conf paysanne à St Quentin Fallavier, plus grande zone logistique de France


    La Confédération Paysanne Auvergne-Rhône-Alpes frappe un grand coup ce mardi 30 janvier en bloquant le gros Péage sur l'A43 à St Quentin Fallavier, qui est relié à la plus grande zone logistique de France.

    Bancs et tables sont installés, un blocage qui semble parti pour durer !

    Des paysans et soutiens y sont allés aussi depuis la Drôme.

    Des prises de parole du meeting dans cette vidéo.

    ❌️La barrière autoroute de la plus grande zone logistique de France bloquée❌️❌️❌️

    Face aux difficultés exprimées par le monde agricole, les annonces du Premier ministre sont largement insuffisantes voire, pour certaines d'entre elles, totalement éloignées des réalités et de l'urgence d'agir pour redonner des perspectives d'avenir à toutes les fermes.

    Pire, le Premier ministre répond aux demandes productivistes et court-termistes de la FNSEA d'affaiblir les normes qui protègent nos principaux outils de productions : les sols, l'eau, la biodiversité… Les quarante années d'ultra-libéralisme sont en train de détruire l'agriculture comme l'environnement. Il faut dire qu'on nous demande à nous, paysannes et paysans, de faire le grand écart entre deux injonctions contradictoires : d'un côté, produire pas cher, être compétitifs sur le marché mondial avec des pays qui ont d'immenses fermes usines et des ouvriers agricoles payés 200 euros par mois…. et en même temps, de préserver la planète ! Entre les deux, il y a notre revenu !

    La suite de cet article à lire sur le site drômois ricochets.cc

    D'autres infos sur la page de la Confédération paysanne de la Loire.

  • Tuesday 30 January 2024 - 17:59

    La Cour internationale de justice le confirme : il y a un risque sérieux de génocide des Palestinien-ne-s de Gaza.

    Il y a urgence à exiger un cessez-le-feu, à nous mobiliser pour la justice !

    Prochain RDV unitaire à Saint-Étienne :
    Veillée mercredi 31 janvier à 17h30
    Hôtel de Ville

    Événement sur la page de BDS 42.

  • Tuesday 30 January 2024 - 17:44

    Pour nos salaires, contre les suppressions de postes, contre la mise en place des réformes à marche forcée, nos organisations syndicales de la Loire : FSU, CGT Educ'Action, SUD éducation, la FNEC-FP FO et le SE-UNSA appellent à une journée de grève et de manifestations le 1er février 2024.

    La crise de recrutement dans l'éducation se pérennise, et toutes les études montrent que la faiblesse des salaires est le premier obstacle à l'attractivité des métiers de l'éducation. Nos organisations exigent de véritables augmentations salariales en particulier par une augmentation significative du point d'indice pour tous les personnels dans ce contexte de forte inflation, ainsi que l'abandon du pacte. Au lieu de poursuivre la dynamique à peine enclenchée avec les mesures mises en œuvre en 2023, le ministre refuse désormais de discuter de nouvelles mesures générales pourtant nécessaires et envisage même une nouvelle transformation des carrières marquée par un poids croissant des hiérarchies.

    Enfin, de nombreux signes confirment l'échec du Pacte. Les personnels ont bien compris qu'il ne s'agissait pas d'une revalorisation. La mise en œuvre du Pacte a également profondément divisé les équipes, d'autant plus que qu'il a donné lieu à des pressions ou interprétations contraires aux textes réglementaires dans le seul but de faire du chiffre et de sauver le Pacte. Par ailleurs, le ministre s'entête à refuser les mesures salariales d'urgence qui permettraient de sortir les AESH et les AED de la précarité.

    Il est encore temps de renoncer aux suppressions de postes pour permettre notamment d'alléger les effectifs par classe mais aussi d'assurer les remplacements. Il faudrait également recruter davantage de personnels dans l'ensemble des équipes pluriprofessionnelles ... La dégradation des conditions de travail, la perte du sens du métier doivent être pris au sérieux. La formation continue saccagée, l'inclusion sans moyens, les effectifs nombreux dans les classes, etc. : tout cela contribue à dégrader encore davantage les conditions de travail.

    Sur la question de l'inclusion, tous les voyants sont au rouge et les personnels enseignants et AESH sont à un point de rupture. C'est pourquoi nos organisations revendiquent :

    • Un statut de fonctionnaire et un vrai salaire pour les AESH, des recrutements d'AESH et de moyens humains à hauteur des besoins.
    • L'abandon des mesures prises dans le cadre de l'acte 2 de l'Ecole inclusive (statut d'emploi d'ARE fusionnant les AESH et les AED, mise en place des pôles d'appui à la scolarité permettant à l'Education nationale de mettre la main sur les notifications MDPH) et l'ouverture de discussions avec les organisations syndicales sur la base des revendications des personnels.

    Le projet de réforme du lycée professionnel est emblématique du moins d'école, moins d'enseignant·es, plus d'entreprises, plus d'externalisation des missions, et plus de management !

    Cette réforme est à rebours des enjeux éducatifs, elle engage des bouleversements majeurs qui auront aussi un impact lourd sur les conditions de travail de l'ensemble des personnels exerçant en lycées professionnels et sur les conditions d'apprentissage des élèves.

    Nos organisations en exigent le retrait ! Elles demandent au ministre de renoncer à présenter ce projet et à engager de véritables concertations au sein du ministère de l'Education nationale sur la base d'un diagnostic rigoureux à partager sur l'état de l'enseignement professionnel tant pour les élèves que pour les conditions de travail des personnels avant toute réforme.

    Plus globalement, les mesures “Choc des savoirs” annoncées par le Ministre dessinent un projet d'école qui revient sur l'objectif de démocratisation et aggrave les inégalités. Elles vont encore dans le sens d'un contrôle accru du travail enseignant (manuel unique, méthodes imposées, évaluations standardisées) contre la liberté pédagogique.

    Pour toutes ces raisons, les organisations syndicales de la Loire FSU, CGT Educ'action, Sud éducation, FNEC-FP FO et SE-UNSA appellent à se mobiliser par des actions diversifiées dès maintenant et à préparer une journée de grève et de manifestations le 1er février.

    Dernier numéro de « Classe en lutte » et appel à la grève de la CNT-FTE

    Manifestations dans la Loire :

    • Roanne (10h30) : départ devant les inspections du 1er degré (Avenue de Lyon), arrivée devant la Sous-Préfecture.
    • Saint-Étienne (10h30) : départ de la Bourse du travail en direction de la DSDEN.
  • Tuesday 30 January 2024 - 16:38
  • Tuesday 30 January 2024 - 11:03
  • Tuesday 30 January 2024 - 01:00
    E-Conomie

  • Monday 29 January 2024 - 17:08
  • Monday 29 January 2024 - 16:16
  • Sunday 28 January 2024 - 15:56
  • Saturday 27 January 2024 - 14:39
  • Saturday 27 January 2024 - 11:11
  • Friday 26 January 2024 - 16:19
  • Thursday 25 January 2024 - 11:57
    Notre article sur les questions connues d'avance lors de la conférence de presse d'Emmanuel Macron a vivement fait réagir la profession, certaines rédactions accusant "Arrêt sur images" de colporter des "fake news". Le titre de l'article était bien erroné, mais aucune des informations contenues dans le papier n'ont été remises en cause. Le titre a été modifié et l'article, mis à jour. Paul Aveline, rédacteur en chef, est revenu sur les coulisses de cette erreur et de nos informations avérées dans sa matinale sur Twitch, "Le 7:15".

    http://api.arretsurimages.net/api/public/media/visuel-equipe-donorbox-2023/action/show?format=thumbnail_rss
  • Friday 05 January 2024 - 17:57

    Catherine Gauthier, socio-anthropologue (et membre du GREMMOS), nous invite à revenir sur son dernier travail de recherche, qui avait donné lieu à l'exposition Sur place ou à emporter, et à ses suites roboratives.

    Face aux fortes transitions culturelles qui transforment notre manière d'habiter nos villes et nos campagnes, face à la crise du petit commerce en centre-ville – y compris avec l'inflation et la hausse du prix des carburants –, comment regarder et penser nos quartiers marchands paupérisés ?

    Comment les projets de redynamisation urbaine ou de développement rural font place au petit commerce nouvelle génération ? À la restauration rapide, à la place des jeunes dans les rues ? Comment une société de la mobilité influence la vie de nos rez-de-chaussée ?

    Cette recherche collective s'achève cette année avec la diffusion d'un nouveau film et d'une exposition mise à jour ainsi que de projets de journées d'études et d'ouvrages. À découvrir sur les ondes de Dio et dans divers lieux de la région Aura.

    Musique :

    1-Altın Gün – Goca Dünya

    2-Oy Oy Emine

    3-Jacques Higelin – Vague à l'âme

    Une émission à écouter sur le site du Gremmos

  • Friday 05 January 2024 - 16:35

    Synopsis trouvé sur le net :
    « Nimer, un étudiant palestinien réfugié clandestinement à Tel-Aviv, rêve d'une vie meilleure à l'étranger. Une nuit, il rencontre Roy, un jeune avocat israélien. Ils s'éprennent l'un de l'autre. Au fil de leur relation, Nimer est confronté aux réalités cruelles de la communauté palestinienne – qui rejette son identité – et de la société israélienne – qui ne reconnaît pas sa nationalité. Sur fond de lutte familiale, politique et sociale, Nimer doit choisir entre son désir d'ailleurs et son amour pour Roy. »

  • Friday 05 January 2024 - 16:27

    Il y a 3 ans, des centaines de personnes prenaient la route à pied depuis Marseille, Montpellier, Lille, Rennes, Strasbourg, Lyon, Grenoble et d'autres villes encore en direction de l'Élysée. Pendant un mois, la Marche Nationale des Sans Papier a parcouru la France pour demander au gouvernement Macron la régularisation de tou.te.s les sans papier, la fermeture des Centres de Rétention Administrative et un logement digne pour tou.tes.

    Face à un gouvernement incapable de les entendre, de les recevoir, un film collectif est né.
    « Pour que la marche reste dans l'histoire, pour en garder la mémoire, pour qu'elle s'inscrive dans la continuité de la lutte des sans-papiers pour leurs droits et pour que l'histoire des immigrés reste toujours vivante. » Sembala, CSP 75 (Paris) et Makan, CSP Montreuil.

    3 ans ont passé, et toujours rien... Enfin si, une enième loi Immigration a été adoptée par l'Assemblée Nationale le Mardi 19 décembre 2023...
    Parmi les mesures prévues dans celle-ci : l'attaque du droit aux aides sociales des personnes étrangères non européennes, la création avec le titre de séjour « métier en tension » d'un statut de salarié attaché à son employeur qu'il ne pourra quitter sous peine de perdre son titre de séjour, le rétablissement du « délit de séjour irrégulier », le durcissement des conditions du regroupement familial, la fixation de quotats migratoires, la facilitation de l'expulsion des étrangers, l'introduction dans le droit de la déchéance de nationalité, la mise sous conditions du droit du sol,...

    La mobilisation face à cette loi s'organise :

    -Pour le retrait définif de cette loi,
    - Pour la régularisation de tous les sans-papiers/demandeurs de papiers
    - Pour la fermeture des Centre de Rétention Administrative
    - Pour un logement digne pour tous.tes

    « Personne n'est illégale sur cette Terre » Myriam, CSP 75 (Paris)

    Dans le cadre de cette lutte, nous vous proposons de diffuser au maximum et d'organiser des projections du documentaire : « On a marché ». Parlez en autour de vous. En effet, ce documentaire est un outil, en plus d'être une archive : il peut être la base de discussions, de réflexions collectives à mener ensemble.

    "Il faut absolument qu'on s'y mette pour lutter contre cette loi. La seule chose qui va falloir, qu'on va y arriver c'est de construire, se mettre ensemble, mener des actions de solidarité pour pouvoir lutter contre cette loi bidon, fou ! » Mohamed, porte parole des livreurs à vélo de Grenoble.

    Vous retrouverez des informations, la bande annonce et l'affiche du film sur le site : https://onamarche.com

    Le film est disponible en accès libre sur youtube à l'adresse suivante :
    https://www.youtube.com/watch?v=QmiUYEMP_r0
    Si vous souhaitez le télécharger, dans le cadre d'une projection par exemple, le film est disponible en streaming ou en téléchargement à ce lien :
    https://mnsp2020.clouds.gresille.org/index.php/s/3LD4eHR8b4dHA6k

    Notre adresse mail : mnsp2020 chez riseup.net

    #onamarchéregularisez
    #onamarchéloiimmigrationretirée
    #onamarchéonvagagner

  • Wednesday 13 December 2023 - 18:27

    Eddy a touché les allocations du chômage alors qu'il était détenu. L'État l'accuse d'escroquerie, et il a été condamné à 18 mois fermes, en plus de rembourser les sommes perçues. Pourtant, cet argent, il y a droit ; il s'agit de ses cotisations. L'argument contre lui, c'est qu'on ne peut pas chercher de travail en prison. C'est faux, puisque c'est ce qui est demandé pour un aménagement de peine… Il a tenté de trouver un accord avec Pôle Emploi, mais ils ont fait la sourde oreille, jusqu'à le traîner au tribunal. Il n'a pas pu être présent pour le jugement, et a fait appel de cette condamnation. Le procureur a décidé de l'incarcérer en attendant...
    Il nous explique plus en détails sa situation, et parle aussi de la prison.

    Article paru sur le blog Info Prison Saint Etienne

    Transcription résumée de son récit qu'on peut écouter aussi ici

    Je m'appelle Eddy G., j'ai 43 ans, j'ai 15 ans de prison derrière moi, j'ai du être condamné à 19 ans sur le papier, et j'ai effectué 16 ans pleins. Pour diverses condamnations, du cambriolage, de la violence avec arme, de la conduite avec alcool, du stup… y'a un petit peu de tout…

    Ma dernière peine j'ai été condamné à 18 mois, en fait 12 mois fermes et 6 mois de révocation, j'ai eu les remises de peine et ces 6 mois ils me les ont ajournés, donc je peux pas vous dire ce que c'est l'ajournement, c'est la première fois que je vois ça, ça devait les arranger…

    Voilà mon souci avec Pôle Emploi. J'ai été incarcéré, j'avais des droits au chômage mais je n'avais pas ouvert mes droits, et après je suis sorti en aménagement de peine au premier confinement. Donc là c'est ma mère qui s'occupe des papiers qui m'a fait mon chômage pendant mon aménagement. Puis 15 jours après j'ai une révocation de mon aménagement, donc on m'a remis mes 10 mois, et on m'a rajouté en plus 6 mois en me disant que j'étais bien en prison, ça fait qu'ils m'ont mis 16 mois.

    Je savais pas qu'on a pas le droit de toucher le chômage, je savais pour le RSA et la Cotorep, parce que les CPIP vous le disent, mais le chômage personne m'en avait parlé, donc j'ai fait pointer ma cousine. J'ai touché mon chômage depuis la détention, et personne m'a rien dit. Mais mon ex compagne a dit à Pôle Emploi que j'avais touché mon chômage, et pour eux c'est comme si je les avais spoliés.

    Quand la femme du Pôle Emploi m'a contacté, elle m'a dit que je n'avais pas le droit de toucher le chômage car je ne suis pas censé chercher du travail en détention. Je lui ai expliqué que si, que Pôle Emploi intervient, qu'il y a le GREP pour la réinsertion, et que pour passer en commission pour aménager une peine il faut un travail et un logement.

    C'est sûr que celui qui a [été condamné à] 20 ans il cherche pas du travail, il a pas le choix il peut pas, mais quand t'as une petite peine et que tu veux faire un aménagement, oui on cherche du travail en détention.

    Donc j'ai contesté en gendarmerie, j'ai été accusé d'escroquerie à l'État. Après, je suis re-rentré en prison pour un problème d'alcool au volant, et pendant 6 mois de ma détention, j'ai essayé d'arranger le problème de Pôle Emploi. Je leur ai proposé de les rembourser, et qu'ils me rendent mes 610 heures, mais pendant 6 mois j'ai pas eu de réponse. Le premier RV qu'on m'a donné, la femme avait pas de connexion internet en détention donc elle a pas pu me dire quoi que ce soit. Après elle devait me tenir au courant, ça n'a pas été fait, je les ai recontactés au bout de 2 ou 3 mois, puis voilà sur 6 mois j'ai pas eu de nouvelles.

    Là on m'a envoyé une convocation pour le 17 octobre. Seulement je travaille… Je suis sorti en juillet et j'ai tout remis en place, logement, scooter car je n'ai plus de permis, j'ai passé 2 CACES, j'ai des RV Spip, je travaille depuis 3 mois. Déjà on me donne une convocation qu'il faut que j'aille chercher jusqu'à Saint-Étienne sans permis… donc j'ai dû me débrouiller avec un ami pour aller chercher cette fameuse convocation, tout ça pour un tribunal, ils me l'auraient envoyée en recommandé c'était bien suffisant…

    J'ai appelé en disant que je ne pouvais pas, que ça ne coordonnait pas avec mon travail. La secrétaire greffière me demande de lui expliquer mon contentieux avec Pôle Emploi sur un mail, et elle verra s'ils peuvent décaler en fonction de mes horaires de travail. J'ai envoyé un mail assez long, mais je ne maîtrise pas internet, j'aime pas ça, donc j'ai dû me tromper d'un tiret, donc le mail est pas parti, et pour eux je me suis pas présenté et j'ai pas justifié mon absence…

    Donc ils m'ont jugé par défaut, et ils m'ont mis 18 mois fermes, avec un mandat d'arrêt. Donc demain, le 12 (décembre) je suis convoqué, je dois aller à la gendarmerie à 8h30. Je dois amener mes justificatifs de tout ce que j'ai mis en place depuis ma sortie et c'est le procureur qui va décider s'il met à exécution le mandat d'arrêt et que je vais en détention, ou alors s'ils me laissent dehors jusqu'à la date du jugement, parce que j'ai fait appel du jugement, donc on va voir… j'ai mon boulot, encore ce matin j'ai travaillé à 5h du matin...

    J'ai mon oncle qui est mort, ça date de 97, mais c'est pareil maintenant… Il a fait un arrêt cardiaque dans sa cellule, le soir après la fermeture. Après le repas de soir, une fois que les portes sont fermées, aucun surveillant peut ouvrir les portes, il faut un chef de détention. Donc ça met un certain temps avant qu'il vienne de ses pénates le gars… Et mon oncle ça lui a serré la poitrine, donc il est tombé par terre… j'ai vu son codétenu, des années plus tard, et il a appelé plus de 40 minutes, avant qu'ils viennent.. Donc un arrêt cardiaque 40 mn après… c'est le frigo après c'est plus le massage…

    Surtout maintenant… ils viennent à 6, je l'ai vu hein… ils vous embrouillent avec un surveillant, et ils viennent à plusieurs, il y en a un qui vous pousse sur le lit, donc vous tombez face contre le lit, et après il y en a un qui vous tient les bras, et les autres ils vous tapent en traître… et je vous jure que c'est pas des conneries, je vous mens pas, vous pouvez noter mon nom j'en ai rien à foutre, je dis ce qui est vrai , je ne grossis pas la chose… je m'en fous des conséquences, si ça me porte préjudice à moi j'espère au moins que ça servira pour les autres.

    Ma pensée par rapport au Spip et à la question de la réinsertion, je trouve qu'il y a rien du tout, c'est néant. Les seuls gens qui se réinsèrent, c'est à leur bonne volonté, parce que ce qu'il y a mis en place, y'a vraiment rien… En fait ils s'en foutent que vous vous réinsériez, à chaque fois ils vous condamnent ils regardent même pas vos efforts, les choses que vous mettez en place… en plus ils me parlent de mon chômage !!!

    Y'en a pas des milliers qui ont le chômage ! Y'en a plein qui grugent le RSA, qui se déclarent alors qu'ils sont en détention, et ils ont raison, parce que le coût de la vie en détention, faut pas croire…

    J'étais abonné à l'OIP en 2005, ils estimaient le coût de la vie, sans faire de folies, juste en achetant de quoi manger, le nécessaire de toilette… à 250 euros par mois. Et on est en 2023 ! Je viens de sortir en juillet dernier, je vous certifie, il faut au minimum 300 euros, si vous êtes fumeur, buveur de café, et que vous voulez prendre une tablette de chocolat, un filet de patates, un paquet d'oignons, un peu de beurre et un peu d'huile… il vous faut 300 euros et vous faites pas de folies ! Et la réinsertion, y'a rien du tout.

    Regardez, moi j'ai voulu régler mon problème avec Pôle Emploi, la femme du Pôle Emploi elle-même, la première fois elle a pas de connexion, la deuxième fois elle m'a jamais répondu, sur 6 mois de détention…

    Le Spip, bein lui, il a carrément rien fait, il m'a renvoyé vers une assistante sociale. J'ai voulu refaire ma carte d'identité qui était périmée… de mars à juillet ça n'a pas été fait. J'ai fait les photos là bas, mais le gars de la préfecture n'est jamais venu. Il a fallu que je sorte en juillet, et j'ai eu ma pièce d'identité après. Mais en détention y'a rien qui s'est passé… ni pôle emploi…

    Ni les soins… j'ai pris un genre de champignon, c'est même pas un champignon de ce qu'lis me disent eux… Dans les premières détentions, je savais pas, j'ai rien mis par terre dans la douche, et j'ai attrapé ça. Même au jour d'aujourd'hui, j'ai pris 15000 traitements, c'est pas passé…. J'ai un ongle qui est comme mort et j'arrive pas à le soigner… j'ai pris ça là bas parce que c'est vraiment dégueulasse, c'est sale… il y a certaines prisons qui sont un peu plus propres mais bon… moi je vais régulièrement à la Talaudière, c'est plus que sale… le milieu carcéral est bien opaque…

    En détention ils vous laissent un peu… pas à l'abandon mais… si c'est ça...enfin bon, moi j'ai pas besoin qu'on s'occupe de moi mais bon… c'est plus ou moins de l'abandon quoi… ils vous foutent dans une cellule, et ils essayent au maximum de vous mettre des cachets… au moindre truc ils vous disent « vous devez être stressé, vous voulez pas un truc pour dormir ? » c'est sûr que, tous lobotomisés aux cachets, c'est moins vivant, y'a moins de mouvement à la rate déjà…

    Moi je suis sorti en juillet de Moulins Yzeure. Il y a un gars qui a pris des cachets dans sa cellule le soir, ils étaient 3 dans sa cellule. Maintenant ils blindent, on est 3 ou 4 dans la cellule… enfin bref, le gars il a pris des cachets le soir. Le matin, à 7h c'est l'ouverture des portes et il y a une ronde. Donc là le surveillant doit vérifier que tout le monde est vivant. Il doit faire bouger tout le monde pour être sur. Là il en a fait bouger 2, le troisième ça l'a pas dérangé qu'il bouge pas… Sauf qu'en fait il était mort le gars. Ils s'en sont aperçus parce qu'à 9h le gars il avait un RV pour le médical. Et ils ont dit aux autres, « réveillez votre codétenu il a un RV » « non mais il se réveille pas depuis hier » bein il était mort. Moi j'étais dans la cellule d'en face. Et les gars qui ont été faire la levée du corps, et bein ils rigolaient dans le couloir, même moi ça m'a outré je me suis dit c'est vraiment un truc de fou. Ils rigolaient et ils disaient « j'espère qu'ils payent les heures sup', parce que moi je suis d'astreinte ce soir, on peut faire le deuxième ». Franchement quand vous êtes détenu et que vous entendez ça… c'est pas que ça m'a fait peur mais… je me suis dit quel monde de… bon avec le respect de mes vulgarités hein… mais c'est vraiment dégueulasse…

    Moi la justice je suis pas d'accord avec parce qu'elle est pas égale pour tout le monde, elle est pas juste pour tout le monde. J'ai vu plein de cas différents, pour ma part, j'ai eu un refus d'aménagement de peine, alors que j'avais tout, un travail, mais c'était Adecco. Ils m'avaient fait un papier comme quoi si je sortais en aménagement de peine je travaillais tout de suite par eux. Et puis j'avais mon logement, j'avais tout. Et bein on m'a refusé mon aménagement de peine en me disant que l'intérim c'est pas un boulot stable. Moi je bosse en interim depuis des années ! Mais ils m'ont refusé. Par contre à d'autres… J'ai vu un article dans le journal une fois, un qui passe au tribunal pour plusieurs grands excès de vitesse, au-delà de 200km/h. Ils lui mettent 4 ans ferme. Et un gars en récidive de pédophilie il prend 6 mois avec sursis. Là récemment y'a un juge qui a été condamné, il a prostitué sa fille mineure, il a pris du sursis. Récemment hein ! Donc l'égalité et la justice pour tous, j'ai pas compris…

    Moi je me suis fait arrêter après l'accident de Palmade, mais bon, moi je fais rire personne… Et moi j'avais alcoolémie, et positif au CBD ; et une arme dans mon coffre, mais démontée, un héritage de mon père. Moi j'ai eu un an ferme. Mais j'ai pas fait d'excès de vitesse, pas d'accident… et ils m'ont enlevé mon permis, j'étais titulaire depuis 99, j'avais 12 points.

    Ils m'ont annulé le permis, mis un an ferme, et 6 mois de révocation, donc 18 mois ferme. Pour une conduite sous alcool et sous CBD.

    On dit qu'un détenu coûte 90 euros par jour à l'État en prison, et ils estiment que c'est 10 ou 12 euros à peu près en bracelet électronique. Déjà si ça leur coûtait moins cher d'aménager les peines, pourquoi ils le font pas ? Bein parce que sincèrement je pense qu'il y en a trop qui gagnent leur pain autour de la déliinquance. T'as le juge, l'avocat, le gendarme, le surveillant qui mangent… t'as vraiment beaucoup de gens qui mangent là dessus, sur la délinquance… alors bien sûr qu'ils ont pas envie de se priver de ça !

    Donc ils aménagent pas beaucoup de peines. Y'a aussi pour la victime, parce qu'ils ont l'impression que les gens sont pas punis… mais bon, il est bien plus utile chez lui, obligé de travailler ou faire des soins, au moins il bosse, il paye sa note… et puis il coûte moins cher. Mais bon, faudrait expliquer ça aux victimes…

    Regardez, moi ils me condamnent à 18 mois, pour un Pôle Emploi ! Déjà, j'ai pas arnaqué, parce qu'ils disent une escroquerie à l'État, et que le Pôle Emploi subit un préjudice. Sauf que non, j'ai cotisé en fait, ils m'ont juste payé ce qu'ils me devaient. Que je sois en prison ou dehors, ils m'auraient payé pareil. Sauf que moi dehors je travaille donc j'en ai pas besoin, si je m'en sers pas quand j'en ai besoin, ça sert à quoi le chômage ?

    Et ils me mettent 18 mois fermes, à quoi ça sert ? Moi j'ai pris un logement, mais j'avais pas de travail car j'ai un gros casier, et je viens de sortir de détention, comme j'avais plus de permis, pas de scooter, le temps que je reprenne tout ça en main… la femme elle a loué sous réserve du travail… jusqu'en février c'est un bail précaire que j'ai. Donc là ils veulent me faire rentrer, je vais perdre mon travail, mon logement, et en plus je vais aller en prison et je pourrai pas rembourser ma note. Donc je vois pas l'utilité de me condamner à 18 mois. D'autant plus que les un an de chômage que j'ai perçu, c'était en 2019, j'ai re-cotisé quasiment 2 ans derrière. 1 an et demi après j'ai fait 6 mois de prison et là je travaille depuis plus de 3 mois. Ils peuvent se rembourser instantanément avec mes cotisations que j'ai faites derrière. Alors quelle utilité de me mettre 18 mois, je sais pas.

    Mais bon Palmade lui faut pas le mettre en prison, lui il a pas fait de mal aux gens… il va en boite de nuit… c'est le monde à l'envers quoi, ça va pas du tout...



  • Tuesday 28 November 2023 - 19:14

    Comment les auteurs d'extrême-droite ont décrit et pensé la mine et les mineurs du bassin minier stéphanois ? C'est la question à laquelle on essaye de répondre dans cette émission du Gremmos. Bien loin des imaginaires liés aux luttes et conquêtes sociales véhiculés par l'extrême-gauche, les poètes et écrivains d'extrême-droite ont dépeint les mineurs comme des travailleurs « besogneux », prêts à se sacrifier pour la patrie.

    Jean-Paul Gaschignard, ancien chercheur au Puits Couriot-Musée de la Mine,

    Jean Tenant (1885-1986), poète et écrivain stéphanois, membre de l'Action française, rédacteur en chef des Amitiés foréziennes et vellaves et chroniqueur littéraire du Mémorial durant l'entre-deux-guerres (portrait publié dans Forez Auvergne Vivarais).

    fin connaisseur du monde de la mine, en particulier des poèmes et des chansons consacrées aux travailleurs du fond à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, nous invite à découvrir une partie de cette littérature.

    Afin de rompre avec une approche traditionnelle du prolétariat minier, ancrée dans un imaginaire socialisant, voire sous influence communiste, c'est au contraire l'influence d'auteurs, poètes et chansonniers inscrits à l'extrême-droite qui sera ici exposée. L'importance de ce creuset littéraire et artistique dans la construction des représentations de la mine, jusqu'à aujourd'hui d'ailleurs, mérite d'être mis en avant. Son étude doit permettre aux acteurs et observateurs contemporains d'éviter de perpétuer, sans en avoir conscience, des clichés ou des mythes découlant d'une vision tout aussi politisée du « monde de la nuit » que celle qu'a promue la gauche et l'extrême-gauche depuis plus de deux siècles.

  • Tuesday 28 November 2023 - 18:27

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    « En temps de crise l'extrême droite a pour stratégie de tenter des rapprochements avec l'autre bord de l'échiquier politique. Nous en appelons donc à la vigilance, afin qu'aucune passerelle ne soit établie entre nos mouvements et des courants antisémites, racistes, antiféministes, nationalistes, conspirationnistes, etc., etc., et les personnes qui pourraient être complaisantes à leur égard. » [1]

    C'est par ces mots qu'il y a dix ans les animateurs des éditions L'Échappée - Cédric Biagini, Guillaume Carnino et Patrick Marcolini - répondaient aux critiques qui leur avaient été faites quant à la présence d'un proche d'Alain Soral, Charles Robin, parmi les auteur·ices de leur recueil intitulé Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques. Cet ‘appel à la vigilance' sonnait alors comme une résolution sérieuse, et ferme.

    De 2008 à 2013, le groupe anti-industriel Pièces et Main d'Oeuvre (PMO) a dirigé au sein des éditions L'Échappée la collection Négatif. Ce groupe, qui s'était fait connaître pour son opposition aux nanotechnologies, va, autour des années 2013-2014, intensifier ses prises de positions ouvertement antiféministes et transphobes. Celles-ci seront suivies de déclarations islamophobes et de collaborations régulières avec des publications proches de l'extrême-droite telles RageMag, Le Comptoir, ou Limite.

    Le développement violemment antiféministe et raciste de PMO, qui dès 2004 attaquait le « popullulationnisme » des « techno-lesbiennes » [2], devint emblématique des glissements réactionnaires potentiels du courant anti-industriel, qui trouvent un terrain propice dans ses tendances à l'essentialisation positive de la « Nature » et sa négation de la pluralité des rapports de domination au profit d'une seule critique, celle du « techno-totalitarisme » des « technocrates » qui menacerait une humanité indifférenciée.

    Il aurait été concevable que le courant anti-industriel (qui a émergé au cours des années 1980 avec la revue post-situationniste l'Encyclopédie des Nuisances devenue ensuite maison d'édition), dont de nombreu·ses membres se revendiquent de l'anarchisme, se distingue de ces offensives réactionnaires en leur sein et en produise une critique émancipatrice. Ni l'un ni l'autre n'est arrivé.

    PMO a continué à évoluer sans encombre au sein du mouvement anti-industriel [3]. Et PMO a essaimé. Des initiatives sont nées, se revendiquant de leur héritage réactionnaire, comme le podcast Floraisons, ainsi que les Éditions Libre et la branche française de Deep Green Resistance (DGR), toutes deux co-fondées par Nicolas Casaux et Kevin Haddock, qui revendiquent une transphobie assumée.

    Paul Cudenec, un « anarchiste » transphobe, antisémite et antiféministe

    En novembre 2022 est sorti le deuxième numéro de Brasero, la revue des éditions L'Échappée coordonnée par Cédric Biagini et Patrick Marcolini. Au sommaire de la revue, où l'on retrouve des habitué·es de la maison tel·les qu'Anne Steiner et François Jarrige, un article intitulé « Pour la loi de la nature » est signé par un personnage peu connu des lecteur·ices français·es : Paul Cudenec.

    Paul Cudenec est présenté par les éditeurs comme un « journaliste, essayiste et romancier anglais, installé depuis 2013 dans les Cévennes, auteur d'une dizaine de livres, [et participant] aux sites Winter Oak et Organics Radicals. »

    Paul Cudenec est en effet un essayiste connu en Angleterre pour ses prises de position anarchistes et spiritualistes proches du primitivisme. Winter Oak et Organic Radicals ressemblent quant à eux plus à des blogs personnels qu'à des projets collectifs, de même que Network23 et le Substack à son nom, tous republiant les mêmes articles.

    Mais c'est peu dire sur Paul Cudenec que de s'arrêter à cela. Un rapide coup d'œil, à l'aide d'un moteur de recherche, à la production littéraire de ces dernières années de Cudenec interpelle par ses titres évocateurs : Le nouveau visage du Fascisme : Exposer le Great Reset (2021), Qui se cache derrière le gang vacciniste de la fausse-gauche ? (2021), Klaus Schwab et son Great Reset fasciste (2020) [4].

    En quelques clics Paul Cudenec nous apprend donc que « Klaus Schwab est un enfant de l'Allemagne d'Adolf Hitler », que George Soros et l'« élite mondialiste » financent le « fascisme pro-technologie » et « vitaphobe » du « transgenrisme » et du « féminisme intersectionnel », tout en controlant Black Lives Matter et les antifascistes, et qu'« Israel est l'un des principaux défenseur du Great Reset ».

    Un peu plus loin il dénonce « le totalitarisme du putsh Covid mondial », et les « soi-disant anarchistes » qui auraient soutenu « le confinement fasciste et le port du masque compulsif » qui nous « musèle » et « nous mène droit vers l'enfer transhumaniste » [5]. Cudenec publie également des articles très enthousiastes sur les Convois de la Liberté organisés par l'extrême droite canadienne et les manifestations antivax françaises de l'été 2021, dont des reportages photos [6] mettant à l'honneur des pancartes associant le pass à l'étoile jaune, ou promouvant les réseaux antisémites La Rose Blanche et Réinfocovid [7].

    Dans la même veine, il a également publié un éloge du pamphlet de Julien Coupat [8] acclamé par les réseaux néonazis internationaux, le Manifeste conspirationniste (Seuil, 2022). En Allemagne, une version a été publiée en décembre 2022 par une maison d'édition d'extrême droite [9] qui nous informe sur leur site que la traduction « a été établie en étroite collaboration avec la maison d'édition parisienne et les auteurs, qui ont apporté un certain nombre de compléments à l'édition allemande ».

    En juillet 2022 dans une interview publiée par le principal groupe anti-industriel italien Resistenze al Nanomondo, Paul Cudenec, entre deux attaques contre le « culte transgenre » et « l'arnaque intersectionnelle », et un appel à libérer « notre sens du sacré », nous raconte son parcours qui l'a conduit de l'anarcho-primitivisme jusqu'à son récent coup de cœur pour les anti-industriels français citant notamment Miguel Amoros et Renaud Garcia.

    Se réclamant des penseurs traditionnalistes et fascisants René Guénon et Ernst Junger, Paul Cudenec invite les anarchistes à rejeter les « théories matérialistes » en retrouvant « la sacralité du vivant ». « Le but de la vrai spiritualité », nous dit-il, est « de prendre conscience de [notre] appartenance cosmique » et « de nous permettre de servir de véhicule à l'organisme universel dont nous ne sommes qu'une partie » [10].

    En 2013, les éditeurs avait expliqué la présence d'un auteur néofasciste dans leur recueil en ces mots : « Cet auteur, Charles Robin, nous avait été recommandé par une personne de confiance […]. Notre erreur aura été de ne pas nous renseigner sur Charles Robin (nous ne l'avons même pas googlisé !) ».

    Matthieu Amiech et les éditions La Lenteur

    Si les éditions L'Échappée sont un bastion incontestable du mouvement anti-industriel, une autre maison d'édition en est l'héritière principale : les éditions La Lenteur fondées en 2006 par Nicolas Eyguesier et Matthieu Amiech [11], et diffusées, tout comme les Éditions Libre, par Hobo diffusion.

    Matthieu Amiech, également membre du Groupe Marcuse et d'Écran Total (groupe contre la numérisation créé en 2013), y a récemment publié L'industrie du complotisme, un livre qui selon la recension enthousiaste de la librairie Quilombo accorde « autant de place à l'instrumentalisation étatique de l'anti-complotisme qu'à la montée du complotisme » [12].

    En 2016 Matthieu Amiech avait brièvement pris la lumière médiatique en publiant dans Le Monde une tribune intitulée « Contre l'islamisme, ni “Causeur” ni “Crieur” », dans laquelle, se positionnant nettement du côté des « républicains fervents et martiaux » contre les « amis des musulmans », il reconnaissait aux premiers « un discours relativement lucide sur le péril islamiste, la volonté de sécession d'une fraction des musulmans et la nécessité d'un front le plus large possible pour faire barrage aux revendications identitaires risquant d'aboutir à la dislocation de la société. » [13]

    En mars 2021, dans une interview pour Mediapart où il comparait la crise sanitaire à la victoire nazie en juin 1940, Matthieu Amiech faisait part de ses inquiétudes à propos de « la focalisation obsessionnelle sur une vaccination improvisée, biotechnologique et aux effets radicalement incertains » face à ce qu'il décrivait comme « un coronavirus de dangerosité modérée » [14].

    En mars 2021 cela faisait plus de 5 mois que l'on comptait en moyenne 300 morts par jour du Covid-19 en France. Morts dont la proportion a toujours été beaucoup plus importante parmi les classes populaires et racisées [15]. Et dès 2020 un nombre considérable de personnes de tous âges rapportaient déjà des séquelles à long terme suite à une infection, même d'apparence « bénigne ».

    La pandémie de Covid est devenue un sujet important du mouvement anti-industriel et notamment des éditions La Lenteur qui vont publier une série de mini-brochures dont Souriez, vous êtes soignés de Pierre Bourlier (12/2020), Où est passé la colère ? La politique prétendument sanitaire et ses conséquences de Écran Total (01/2021), et Ceci n'est pas une crise sanitaire de Matthieu Amiech lui-même (09/2021).

    Dès le début de son texte Pierre Bourlier nous invite à « remettre en cause la gravité de l'épidémie ». Selon lui la pandémie de Covid-19 est « une peste imaginaire » qui sert une « offensive totalitaire ». Et « l'obligation du port du masque est le symbole de ce muselage ». Amiech quant à lui suit la même ligne tout en intensifiant le propos antivax, affirmant qu' « il n'y a pas de rupture profonde dans l'état de santé de la population depuis mars 2020 à cause du Sars-Cov 2 » et que « les vaccins bio-technologiques achèvent de transformer notre monde en un vaste laboratoire hors-contrôle ». Cette « terreur » exercée à travers l'imposition de « vaccins génétiques » par l'« oligarchie mondiale » aurait pour but « l'informatisation "totale" du monde ».

    Pas un mot ne sera consacré aux profondes inégalités d'accès nationales et internationales à un médicament préventif qui réduit drastiquement les formes graves de la maladie et diminue les risques de séquelles. La principale source « scientifique » mobilisée par ces textes est Laurent Mucchielli, directeur de recherche au CNRS devenu un fervent promoteur de Didier Raoult et de ses traitements dangereux, et qui en octobre 2020 a co-fondé le principal réseau de désinformation médicale français Réinfocovid. Lors de la parution du texte d'Amiech, en septembre 2021, l'implantation de Réinfocovid au sein de l'extrême-droite radicale et antisémite est amplement établie et documentée.

    Enfin dans son texte Amiech qualifie les prises de position antifascistes comme celle de Sud Education de « sinistre » et d'« anti-populaire ». Le seul clivage politique qui importe est avec ou contre la « technocratie ». Ainsi, selon Amiech « le souci de défendre les plus fragiles face à l'épidémie dissimule mal [...] une approbation des transformations proposées par la technocratie, seringue et smartphone à la main. » Et tout comme dans son interview avec Mediapart, Matthieu Amiech y fait la promotion du groupe raciste, transphobe et antiféministe Pièces et Main d'Oeuvre.

    Sans surprise Laurent Mucchielli, co-fondateur de Réinfocovid donc, fit une promotion enthousiaste sur les réseaux sociaux de l'ouvrage de Matthieu Amiech, L'industrie du complotisme.

    Écran Total et la revue l'Inventaire

    Le groupe Écran Total annonce la couleur dès la première page de sa brochure, se vantant de ne pas respecter collectivement les pratiques de réduction des risques. Plus loin iels déclarent : « Nous appelons donc à désobéir au protocole prétendument sanitaire ; ce que nous faisons chacun à notre manière dans notre groupe. Cela signifie prendre le risque de tomber malade nous-mêmes, et que d'autres tombent malades, y compris les plus fragiles. »

    Mais les éditions La Lenteur ont également publié une autre brochure, que Matthieu Amiech présenta en octobre 2022 à la fête des Faucheurs Volontaires : Basculement de Paul Kingsnorth, dont le titre original est The Vaccine Moment. Kingsnorth y déploie sa version de ce qu'il nomme « l'apartheid vaccinal », affirmant que « tout le scénario de la pandémie a été répété dans un wargame moins d'un an avant que cela n'arrive » et que « la pandémie de covid s'est avérée être l'expérience contrôlée parfaite pour le déploiement de la prochaine étape de l'évolution de la Machine ».

    Matthieu Amiech présente Paul Kingsnorth comme un « écologiste anglais » oubliant de dire que Kingsnorth est un chrétien orthodoxe prosélyte qui dès 2008 se définissait lui-même comme « nationaliste » [16], montrant ensuite un véritable enthousiasme pour le Brexit et la victoire de Donald Trump [17]. Il a depuis pris des positions ouvertement antiféministes et anti-trans, et collabore régulièrement avec des média d'extrême-droite.

    Les brochures d'Écran Total ont bénéficié d'une diffusion par l'intermédiaire de la revue L'Inventaire. La revue L'Inventaire, éditée par La Lenteur, est la principale revue du mouvement anti-industriel. Créée en 2014 et comptant aujourd'hui 12 numéros. On peut lire dans ses éditoriaux que « l'islamisme est un problème majeur » (n5/2017), ou qu'« on ne peut qu'éprouver gratitude et respect pour la laborieuse accumulation d'éléments permettant de reconstituer notre arrière-monde » par Pièces et Main d'Oeuvre, mais aussi qu'« il est important de pouvoir souligner partout que la dénonciation du “complotisme” sert d'abord à décourager la réflexion et la recherche d'information » (n11/2021).

    À l'automne 2022, L'Inventaire livre dans son n°12 plusieurs « Recensions autour du Covid ». Raphaël Deschamps, membre du comité de rédaction de la revue, commence en nous invitant à lire les essais pandémiques de Giorgio Agamben (qui après avoir dénoncé « l'invention d'une épidémie » a comparé les non-vacciné·es aux « juifs sous le fascisme »), celui du chroniqueur du FigaroVox Matthieu Slama, ou L'idolâtrie de la vie du fasciste Olivier Rey.

    Puis il dédie sa recension à tresser les louanges d'Alexandra Laignel-Lavastine et de son essai Le Covid-19 et le Culte de la vie par-dessus tout. Raphaël Deschamps oublie lui aussi de situer le propos de Laignel-Lavastine, raciste militante qui depuis des années multiplie les tribunes dans Valeurs Actuelles et le FigaroVox contre le « fascisme islamique » et la « sphère islamo-gauchiste » [18]. Le magazine libertarien-conservateur Atlantico, a publié des extraits de ce pamphlet contre le « sanitairement correct », promouvant « un essai puissant sans masque ni œillères », quand le Figaro se contente du qualificatif « brillant » [19]. Deschamps termine son texte en nous invitant, avec Laignel-Lavastine, à retrouver « le souci de l'âme » que « le monde de la technique s'est employé à marginaliser ».

    Ces recensions se concluent sur un éloge dithyrambique s'étalant sur 6 pages que Raphaël Deschamps consacre à La Doxa du Covid, le recueil de Laurent Mucchielli. Dans ce recueil en deux tomes, Mucchielli réunit tout ce que la France compte de fans de Didier Raoult et d'habitué·es du blog trumpiste FranceSoir, ainsi que des auteur·ices de la maison d'édition radicalement climatonégationniste et identitaire, L'Artilleur [20]. Raphaël Deschamps quant à lui loue le « courage » de « Mucchielli et ses comparses » qui, en « scientifiques », ont « esquissé les contours d'un rapport moins frelaté au réel et à la vérité ».

    Le numéro 13, annoncé pour septembre 2023, comprendra une note de lecture du best-seller anti-trans Dommages irréversibles d'Abigail Shrier et une « clinique » du film Petite fille par la psychanalyste Bénédicte Vidaillet.

    Ce numéro s'ouvrira avec un article sur l'« écofascisme », signé par Paul Kingsnorth.

    Bertrand Louart et le site Sniadecki

    Cet article de Paul Kingsnorth intitulé « La vérité sur l'écofascisme » [21] a déjà fait l'objet d'une publication en janvier 2023 sur le principal site internet du mouvement anti-industriel, le site Sniadecki édité par Bertrand Louart [22]. Bertrand Louart est auteur de deux ouvrages aux éditions La Lenteur, qui publient également sa revue Notes & Morceaux choisis, mais aussi contributeur de L'Inventaire et animateur de l'émission Racine de Moins Un sur Radio Zinzine, quand il n'est pas occupé à harceler des gens sur Twitter sous le pseudonyme verlanisé de ‘Tranbert Harlou'.

    Dans ce texte sans aucune consistance intellectuelle, Kingsnorth fait un amalgame complet entre l'usage de la notion d'« écofascisme » promu par des éditorialistes comme celleux du Figaro et de Valeurs Actuelles pour disqualifier toute remise en cause du productivisme industriel, et la conceptualisation de l'écofascisme portée par une partie de la gauche révolutionnaire pour analyser l'appropriation de thématiques écologistes par l'extrême-droite et les glissements fascisants d'une partie du mouvement écologiste.

    Pour Kingsnorth « il est difficile de trouver un seul éco-fasciste dans le monde réel ». D'ailleurs « fasciste » est seulement une « injure gratuite et passe-partout », et l'« écofascisme » n'est qu'un moyen de faire taire « la mauvaise catégorie de défenseurs de l'environnement, c'est-à-dire à ceux qui nous offrent une vision de l'humanité et de la nature qui implique les racines, les traditions, la taille réduite, la simplicité, et un retour à des modes de vie antérieurs ». Vision qu'il fait sienne sans réserve. Comme pour Amiech, toute position écologiste qui refuserait cette approche est réduite par Kingsnorth à une allégeance à la « technocratie » portée par des « Verts-Machine ».

    Ce texte de Paul Kingsnorth a été traduit par Annie Gouilleux, traductrice de plusieurs ouvrages aux éditions La Lenteur et d'articles pour L'Inventaire. En note, Annie Gouilleux nous informe que le texte orignal de Kingsnorth a été publié sur le site anglais UnHerd qu'elle présente ainsi : « "Unherd" signifie "inédit" ou ce qu'on ne vous dit pas ailleurs ; quotidien sur Internet dans lequel Kingsnorth publie des "week-end essays" ».

    La réalité est que UnHerd, où Kingsnorth est donc chroniqueur, a été fondé par Tim Montgomerie, un militant libertarien-conservateur influent, un temps conseiller de Boris Johnson, et supporter du dirigeant antisémite Viktor Orban [23]. Contrairement à ce que laisse entendre Kingsnorth les partisans du Brexit comme Montgomerie ne sont pas des partisans du « local » mais de la dérégulation économique, environnementale et sanitaire, ainsi que de politiques patriarcales et racistes.

    UnHerd, qui selon une stratégie typique de l'extrême-droite cherche à recruter des voix perçues comme venant de la gauche, a développé une ligne nationaliste-libertarienne qui publie des textes favorables au masculiniste pro-viol Andrew Tate, des interviews de Robert Kennedy Jr pour qui le Covid a été « ethniquement ciblé » pour épargner les Juif·ves, ou des articles ayant pour titre Le grand mensonge du changement climatique ou Le changement climatique n'est pas une catastrophe. Les attaques contre les personnes trans et contre les politiques de santé publiques sont des piliers de UnHerd [24].

    Bertrand Louart a publié un autre texte de Paul Kingsnorth, traduit lui aussi par Annie Gouilleux : « L'abolition de l'homme (et de la femme ) ». Ce texte violemment transphobe, que Louart a rangé dans la catégorie « Transgenrisme » de son site, affirme notamment que « le concept “d'enfants trans” » est « une stratégie visant à reprogrammer la société » promue par « les médias, les élites culturelles, et un tas d'ONG généreusement financées » ainsi que « nombres de milliardaires ». Pour soutenir son propos Kingsnorth s'appuie sur le théologien conservateur Carl Trueman et l'éditorialiste de UnHerd Marry Harrington, qui a représenté le magazine aux conférences National Conservatism qui réunissent les grandes figures du néofascisme international, de Peter Thiel à Giorgia Meloni.

    La présence d'un pamphlet anti-trans sur le site de Bertrand Louart n'a rien de surprenant. Celui-ci a multiplié les collaboration avec les militants anti-trans de DGR/Éditions Libre et Floraisons qui soutiennent ouvertement Dora Moutot et Marguerite Stern. Moutot et Stern sont deux militantes anti-trans reçues chaleureusement à l'Assemblée par la macroniste Aurore Bergé, qui s'affichent avec des fascistes tel que Julien Rochedy ou sur la chaîne youtube de l'équipe de campagne d'Eric Zemmour, Livre Noir. Alors que leur antiféminisme et leur transphobie étaient de notoriété publique, Jacques Luzi, Matthieu Amiech et Aurélien Berlan n'ont pas hésité à donné plusieurs heures d'entretiens au podcast Floraisons. Bertrand Louart est lui visible dans des extraits d'un film « co-produit par Floraison et Le Partage ». Deux média que Louart invite régulièrement dans son émission sur Radio Zinzine. Le Partage est un site animé par Nicolas Casaux, co-fondateur de DGR France et des Éditions Libre, connu pour sa transphobie virulente. C'est ainsi que le texte transphobe de Paul Kingsnorth est directement suivi sur le site de Louart d'une traduction par Nicolas Casaux d'un pamphlet anti-trans de Jennifer Bilek, ancienne de Deep Green Resistance passée à l'extrême-droite, qui promeut les théories antisémites du militant néonazi Keith Woods sur de prétendus liens entre « Transhumanisme et Judaisme » [25].

    Quelques mois auparavant, en octobre 2022, Bertrand Louart publiait une recension élogieuse du Manifeste Conspirationniste signée par Nicolas Bonanni [26]. Si le livre est bâti sur la thèse que le virus est avant tout une « fiction », ou qu'il est parsemé d'affirmations sur les vaccins « aux effets secondaires si prometteurs », ou sur les personnes atteintes de Covid Longs qui « en vertu de l'effet nocebo, sont littéralement malades de solidarité » et donc somatiseraient leur maladie, ou bien qu'il nie purement et simplement l'antisémitisme qui a prospéré au sein du mouvement antipass/antivax ; tout cela, pour Nicolas Bonanni, « n'enlève rien aux qualités d'analyse du texte ». Il se félicite même que Coupat se soit enfin approprié les thèses de Pièces et Main d'Oeuvre, et conclu en s'inquiétant des capacités du pouvoir à « conquérir nos âmes ».

    Nicolas Bonanni, contributeur de la revue L'Inventaire, est un des animateurs des éditions Le Monde à l'Envers qui a co-édité, avec La Lenteur, un livre du groupe Écran Total, et a également édité plusieurs figures du mouvement anti-industriel présentes sur le site Sniadecki comme Matthieu Amiech, TomJo ou le Groupe Grothendieck.

    Le Monde à l'Envers avait également publié, en 2014, La reproduction artificielle de l'humain d'Alexis Escudero, un ouvrage qui avait eu un grand succès dans les rangs de la Manif pour Tous.

    Jacques Luzi et Resistenze al Nanomondo

    « Nous avons pris l'initiative, en 2014, de publier en feuilleton La reproduction artificielle de l'humain, dont nous avons réuni la documentation ; formulé le titre ; mâché les idées et les raisonnements ; que nous avons corédigé ; diffusé par voie électronique – avant la parution en livre dont nous avons également imaginé la couverture à la Andy Warhol. La seule chose que nous n'ayons pas faite dans ce livre étant de le cosigner » nous informent PMO dans leur contribution au numéro de la revue Écologie et Politique sortie à l'automne 2022, et intitulé Les Enfants de la Machine.

    Ce numéro, dédié à la gestation et aux techniques afférentes, revendique fièrement son inscription dans la ligne définie par PMO et Escudero. Il a été coordonné par Mathias Lefebvre et Jacques Luzi (contributeur de L'Inventaire et auteur chez La Lenteur), qui sont les premiers à avoir introduit en France, dans les pages d'Écologie et Politique, des écrits de Paul Kingsnorth. Pour réaliser ce dossier Luzi et Lefebvre ont réunit les contributions d'Aurélien Berlan, Bertrand Louart, Michela Di Carlo et PMO, mais aussi de Renaud Garcia, Mélanie Guyonvarch, Gaëtan Flocco, et Silvia Guerini.

    Dans leur introduction Lefebvre et Luzi dressent le tableau : « les technologies de PMA doivent être resituées dans le cadre général des recherches biomédicales qui, de la FIV à l'utérus artificiel et au clonage, en passant par les manipulations génétiques, s'évertuent à étendre à la reproduction les principes usuels de la domination industrialiste ». Contre l'industrialisme et son « geste totalitaire » il faut viser « l'émancipation de l'ensemble du genre humain de la cage d'acier formée par les macrosystèmes technologiques aliénants et destructeurs, plutôt que l'égalité des identités (nationale ou genrée ou ethnique). »

    Mais qui est à la manœuvre pour intensifier ce totalitarisme ? Qui en constitue l'avant-garde ? Tou·tes les contributeur·ices semblent s'accorder : ce ne sont plus seulement les « technolesbiennes » que PMO pointait en 2004, mais plus largement les mouvements féministes et LGBTQ+.

    Selon Silvia Guerini, figure importante du groupe Resistenze al Nanomondo, « les intérêts et les revendications du mouvement LGBTQ+ et du transféminisme en matière de reproduction convergent avec ceux du système technoscientifique et transhumaniste qui veut franchir l'une des dernières étapes pour s'emparer du processus de naissance et parachever son contrôle sur le vivant ».

    Silvia Guerini a récemment approfondi son enquête en se demandant « Qui finance le mouvement LGBTQ ? » dans un article éponyme [27]. La réponse vient dès la première ligne : « Le financement du mouvement transféministe LGBTQ provient de certaines fondations et organisations, comme l'Open Society Foundations de George Soros ». Mais ce n'est pas tout, elle nous informe également que la fédération américaine des Planning Familiaux, en plus de faire du « commerce de tissus et d'organes » [28], a « lancé une campagne visant à remodeler les récits culturels sur la sexualité et la santé reproductive sur la base de la reproduction artificielle de l'humain. »

    Elle conclut : « Ce n'est pas un mouvement populaire, c'est un projet d'élite, beaucoup d'argent est investi dans la promotion d'une condition corporelle dissociative qui nous détache de notre corps sexuel. La cause LGBTQ+ figure désormais en bonne place dans l'agenda des puissants. »

    Resistenze al Nanomondo (RaN), qui comme Cudenec conseille la lecture d'Ernst Junger, anime le lieu La Piralide de Bergame ainsi que le journal L'Urlo della Terra (auquel PMO contribuent régulièrement), et ses liens avec les milieux néofascistes ont déjà été soulignés [29]. En avril 2021 RaN publiait un communiqué de soutien intitulé « Quand un tas de fumier est positif » [30]. Ce texte venait appuyer une action menée deux jours plus tôt : un tas de fumier avait été déversé devant l'entrée du centre social autogéré Paci Paciana, de Bergame également, une pancarte « Complices de la dictature sanitaire » plantée dedans.

    RaN dans son texte de soutien à cette action, nous en donne les raisons, nous apprenant qu'elle était une réaction au fait que « le centre social Paci Paciana a lancé une campagne pour réaliser des tests de dépistage Covid gratuits dans son propre espace ». Ce qui pour RaN est éminemment problématique car « le but de cet étrange test appelé écouvillon va certainement au-delà de la recherche de la présence du SARS-CoV-2. On a affaire à de vrais grattoirs qui peuvent attraper, quoi ? l'ADN pour entamer le suivi du programme lié à cette pseudo pandémie. Tous enregistrés avec leur propre identité numérique qui va de pair avec notre code génétique et qui aura besoin de la technologie 5G pour permettre sa lecture. » Et puisque « maintenant c'est nous qui sommes ces épis de maïs OGM, [...] il est important d'indiquer clairement qui est complice et soutient ce techno-monde cybernétique et transhumaniste et, de fait, soutient et promeut haut et fort cette dictature sanitaire, surtout lorsque ces complicités proviennent d'une cyborg-gauche progressiste libérale arc-en-ciel. »

    Mélanie Guyonvarch et Gaëtan Flocco, qui ont aussi écrit un article pour le numéro Les Enfants de la Machine, publiaient avec d'autres, à l'été 2022, un hommage au mouvement antivax de l'été 2021 dans la revue en ligne Terrestres, revue qui publie régulièrement des plumes du mouvement anti-industriel (Matthieu Amiech, François Jarrige, Raphaël Deschamps, Aurélien Berlan, Écran Total...). Ce pamphlet antivax et antimasque qui s'intitulait « Retour sur le passe vaccinal et son monde » était illustré par Terrestres d'une photo de troupeau de moutons, et prenait pour référence Laurent Mucchielli, dont Mélanie Guyonvarch, Gaëtan Flocco et Fabrice Colomb sont de fervents soutiens [31] et signataires de plusieurs de ses tribunes, dont « Une nouvelle religion vaccinale est née en Occident » (2021). Deux mois plus tard Terrestres publiait son propre éloge du Manifeste Conspirationniste, sous la plume d'un certain Bernard Aspe, qui tout en renvoyant dos à dos déni de cette « maladie de gravité modéré » que serait le Covid et déni « des effets secondaires de la vaccination », reconnaissait un « mérite à l'extrême-droite » tout en mettant en garde contre « les mouvements féministes ou décoloniaux » et leur « piège identitaire ».

    Le contenu de ce numéro d'Écologie et Politique est si brutalement sexiste, transphobe et réactionnaire que des membres du comité de rédaction de la revue Écologie et Politique ont jugé bon de s'en distinguer en en publiant une critique dans Terrestres [32].

    Paul Cudenec, présent à l'évènement de lancement des Enfants de la Machine, s'est scandalisé de ces critiques adressées à ses camarades. Il a donc publié une réponse, sous le titre « La Voix du Système », dans un magazine où il tient une chronique : Truthtalk, un site qui diffuse régulièrement des vidéos de Steve Bannon, ancien conseiller de Donald Trump et chef de file de l'internationale néofasciste [33].

    Renaud Garcia et les éditions L'Échappée

    Paul Cudenec n'est pas le seul à s'être élevé contre les critiques émises sur ce dossier d'Écologie et Politique. Jacques Luzi, coordinateur du dossier, a donné une interview à la revue Le Comptoir en réponse à la critique parue dans Terrestres. Dans cette interview, Jacques Luzi soutient notamment que « l'identité féminine se définit à partir de la capacité reproductive des femmes », mais aussi que « le Planning familial répand le lexique trans selon lequel le sexe est un “construit social” et “mâle/femelle”, “masculin/féminin”, sont des mots à bannir ». La critique émise par ses camarades du comité de rédaction est quant à elle qualifiée de procédé de « censure » typique de la « gauche industrialiste » et des « enragés transactivistes » [34].

    Le mouvement anti-industriel a ses propres relais médiatiques. Le plus évident est le mensuel La Décroissance dirigé par le catholique Vincent Cheynet, et dont les positions profondément réactionnaires sont connues de longue date [35]. La Décroissance est très lié aux éditions L'Échappée : Cedric Biagini y est chroniqueur, de même que François Jarrige ; Patrick Marcolini et Guillaume Carnino y interviennent régulièrement, et Pierre Thiesset journaliste titulaire à La Décroissance est directeur de collection chez L'Échappée. La Décroissance donne donc régulièrement la parole au milieu anti-industriel, à PMO et aux auteur·ices de La Lenteur.

    Mais si les protagonistes du mouvement anti-industriel sont également mis en avant dans Reporterre, ou des publications anarchistes plus confidentielles comme Réfraction ou À contretemps, c'est un autre hebdomadaire qui lui offre sa plus grande publicité hors des espaces militants. Il s'agit ici du magazine Marianne, dirigé par Natacha Polony, dont la ligne éditoriale polarisée par la dénonciation de « la tyrannie des minorités » a rendu son contenu indistinguable de celui de Valeur Actuelles [36]. Jacques Luzi, Matthieu Amiech, Aurélien Berlan, Bertrand Louart, mais aussi Cedric Biagini et Patrick Marcolini ont notamment eu les honneurs de ce magazine qui s'est fait le héraut de la lutte contre « les obsédés de la race, du sexe, du genre, de l'identité » et le porte-voix des campagnes anti-trans. Le Comptoir, qui est également un relai actif du mouvement anti-industriel, a d'ailleurs été fondé par Kevin Boucaud-Victoire - rédacteur en chef de la rubrique débats et idées de Marianne et ancien chroniqueur de la revue Limite - avec certains de ses camarades de Ragemag, webzine qui s'éteignit au bout de 2 ans « après avoir explosé toutes les limites de la décence, sexiste, raciste, islamophobe et antisémite » [37].

    Renaud Garcia, contributeur actif de PMO et auteur phare des éditions L'Échappée (ainsi que membre d'Écran Total et auteur chez La Lenteur et L'Inventaire), semble être particulièrement apprécié par Le Comptoir et Marianne. Cela paraît logique tant à sa lecture on peine à trouver ce qui le distingue de la prose d'une Natacha Polony et de son combat contre les « nouveaux inquisiteurs » [38] que seraient les militant·es féministes, antiracistes et antifascistes.

    En 2021 les éditions L'Échappée ont réédité Le désert de la critique de Renaud Garcia. Un livre initialement paru en 2015 où Garcia se livrait à un exercice de shadow-boxing assez gênant contre des figurines en papier mâché confectionnées à son usage : les « déconstructionnistes ». La nouvelle édition est agrémentée d'une préface inédite, et c'est tout le vocabulaire de Polony que l'on retrouve sous la plume de Garcia qui s'en prend lui aussi aux « nouveaux inquisiteurs » de « la nouvelle doxa de la lutte contre toutes les oppressions », comparant « les milices néoféministes actuelles » à la police politique stalinienne et les luttes antiracistes au totalitarisme orwellien de 1984. Partageant l'obsession de la directrice de Marianne pour les personnes trans, il assène que « l'accusation de transphobie est un cheval de Troie permettant à des hommes trans de prendre le contrôle de groupe de femmes », et se gausse du « souci de ne pas “mégenrer” les gens, autrement dit commettre une erreur d'identification en se fiant à l'évidence de sa perception. »

    Dans Les Enfants de la Machine Renaud Garcia prolonge son propos dans un texte qu'il introduit ainsi : « Cet article développe une thèse avancée dans la préface à la réédition de mon livre Le désert de la critique, selon laquelle les militants [...] qui se rassemblent sous l'étiquette LGBTTQQIAAP, seraient les “agents d'acceptabilité sociale” du parti technologiste : les partisans d'un monde intégralement bureaucratisé, en accélération constante, dirigé par la caste de l'avoir, du pouvoir et du savoir ». Plus loin Garcia fait siennes les positions de Colette Chiland, psychiatre anti-trans qui en 2011 comparait le travail théorique de Judith Butler à l'idéologie nazi [39]. Enfin, se revendiquant d'un « matérialisme organique et vitaliste » il conclue lui aussi que « la technoscience » constitue « le front principal à dénoncer, par-delà la polarisation médiatique extrême droite réactionnaire vs gauche transgressive. »

    Pour appuyer son propos Renaud Garcia évoque également un autre auteur important des éditions L'Échappée : Anselm Jappe. Ce chef de file de la ‘critique de la valeur' a publié en avril 2021 un pamphlet contre la PMA intitulé « Le droit à l'oncle » [40]. Selon Jappe « la PMA, dans toutes ses variantes, depuis la “simple” insémination artificielle jusqu'à l'implantation d'un embryon génétiquement modifié dans un utérus “loué” (gestation pour autrui), la greffe d'utérus, et jusqu'à l'utérus artificiel encore en voie d'élaboration, appartient au même monde que les centrales nucléaires et les pesticides, le clonage des animaux et l'amiante, la dioxine dans les poulets et le plastique dans les océans ». Ce texte, dans lequel Jappe trace un trait d'union entre le transhumanisme et la PMA qu'il rebaptise « zoologie médicalement assistée », a été salué par PMO qui, le qualifiant de « fidèle résumé » de leur propres positions, lui ont fait l'honneur de le republier sur leur site.

    Mais ce n'est pas le seul point commun qu'Anselm Jappe partage avec PMO. En 2022 Jappe a vu l'un de ses écrits réfusé par la principale revue allemande de la ‘critique de la valeur'. La revue Exit !, dont il était un contributeur régulier. Dans cet article intitulé « Vous avez dit "dictature sanitaire" ? » [41] l'auteur de L'Échappée se livre à une charge azimutée contre l'« hystérie vaccinale », nous prédisant que bientôt le rappel vaccinal « sera administré chaque semaine, ou bien nous serons directement reliés à une perfusion continue. Et tout cela dès l'âge de cinq ans ». Pour Jappe cette dictature sanitaire représente « la plus grave restriction des libertés depuis 1945 ». De façon plus étonnante, Anselm Jappe ne se contente pas d'affirmer que « l'utilisation fanatique de la vaccination [...] vise essentiellement à créer un climat de soumission », d'apporter son soutien à Didier Raoult, ou de nier ouvertement le fait que les populations africaines n'ont quasiment pas eu accès aux vaccins, mais va jusqu'à soutenir que « le virus se moque de toutes les mesures et même de l'absence de mesures ». Ce qui le conduit à rejoindre le choeur de ses camarades anti-industriels, relativisant l'implication structurelle de l'extrême-droite dans les mouvements anti-prévention et répétant lui aussi que « l'accusation de théorie du complot est devenue un élément central du discours officiel et vise à étouffer dans l'œuf toute discussion sur les vérités étatiques et médiatiques. » Comme dans son texte sur la PMA, les points de vues contraires à celui qu'il soutien sont affublés des habits du « stalinisme ».

    Les deux auteurs de L'Échappée semblent pleinement d'accord sur ce point. Renaud Garcia affirmant à Boucaud-Victoire, sur Le Comptoir, que le « militantisme “woke” » est une « une résurgence totalitaire, dans le style des organisations de jeunesse staliniennes » [42]. Un point de vue partagé par les édition L'Échappée qui, pour présenter l'ouvrage de Garcia en quatrième de couverture, usent de mots qui rappellent étrangement les éléments de langage des chroniqueurs de CNews : « Les théories de la déconstruction, aujourd'hui portées par la culture “woke”, créent un climat de suspicion et d'intimidation inédit. Elles prospèrent sur le désert humain de la tyrannie des identités. »

    Paul Cudenec est encore plus direct, intitulant un de ses récents articles :
    « Woke is fascism »

    Histoire de dix ans

    Il y a dix ans la publication par les éditions L'Échappée du fasciste Charles Robin parmi les auteurs de Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques avait suscité un large mouvement de réprobation au sein des espaces de luttes. Mais bien que la réponse de la maison d'édition – intitulée « Les Éditions de L'Échappée appellent à la vigilance » [43] - se soit concentrée uniquement sur la présence de cet individu, les critiques émises à la sortie de cette publication pointaient des problèmes bien plus larges, comme la ligne générale de l'ouvrage et le pedigree des auteurs sélectionnés pour ce petit panthéon « radical », ainsi que celui de certains contributeurs.

    De nombreuses personnes s'étaient étonnées que cette sélection de « penseurs radicaux vraiment critiques » par une maison d'édition se revendiquant du mouvement libertaire comporte un certain nombre d'auteurs très difficilement situables dans le camp révolutionnaires. Le profil de certains d'entre-eux retenait particulièrement l'attention, et il peut-être intéressant de voir ce qu'ils sont devenu depuis cette année 2013.

    Guillaume Carnino, co-fondateur de L'Échappée, livrait un papier sur Dany-Robert Dufour. En 2013, Dufour est un ancien directeur de programme au Collège international de philosophie qui s'est spécialisé, comme une bonne part des ‘radicaux' sélectionnés par L'Échappée, dans la critique du « libéralisme culturel », présenté par lui comme un « totalitarisme antiautoritaire » imposant la « désymbolisation » de la « religion du Marché », qui mène notamment au « transexualisme ». Son livre L'individu qui vient, paru en 2011, contient des pages d'une rare violence mysogine, homophobe et transphobe. Cette « critique du libéralisme culturelle » lui a valut des hommages appuyés de la part du néofasciste Alain de Benoist dès 2006 [44]. Dans les années 2010 Dufour a endossé le costume de l'intellectuel qui ne-peut-plus-rien-dire alors que ses ouvrages étaient réédités en poche chez Gallimard, se plaignant en 2017 auprès de Boucaud-Victoire d'être « classé parmi les néoréactionnaires » [45].

    Plus récemment, en 2020 et 2021, Dufour a donné des conférences au Cercle Aristote, un thinktank « souverainiste » mené par Pierre-Yves Rougeyron, animateur à la webtv fasciste TVLiberté et président de l'association "Les Amis d'Eric Zemmour". En 2021 il a également publié Fils d'anar et philosophe chez la maison d'édition néofasciste R&N, un livre biographique basé sur des entretiens menés par Thibault Isabel, ancien rédacteur en chef de Krisis et ancien collaborateur d'Éléments, deux revues néofascistes fondées par Alain de Benoist. C'est d'ailleurs dans les colonnes d'Éléments que Dufour a donné une interview pour promouvoir son récent pamphlet anti-trans Le phénomène trans. En 2013, dans les notices biographiques de Radicalité on pouvait également prendre connaissance du fait que Dany-Robert Dufour était alors le directeur de thèse de Charles Robin.

    Le texte sur Pier Paolo Pasolini avait quant à lui été confié à Olivier Rey, philosophe et mathématicien. Olivier Rey était en 2013 déjà connu pour son implantation dans les milieux catholiques conservateurs et traditionalistes. Il avait publié dans la revue catholique Étvdes, fondée par la Compagnie de Jésus, des articles au titres évocateurs comme « L'homme originaire ne descend pas du singe », il avait également donné un prêche anti-trans lors de la Conférence de Carême à Notre-Dame de Paris en mars 2011, et il était membre d'honneur de l'association Cosette et Gavroche créée en octobre 2012. « Dès le début d'octobre 2012, l'association Cosette et Gavroche a lancé une grande manifestation à Lyon le 17 novembre qui a été le point de départ du mouvement français La Manif Pour Tous », peut-on lire sur le site de l'association.

    Mais c'est peut-être la lecture d' Une folle solitude, Le fantasme de l'homme auto-construit, publié en 2006 par Olivier Rey, qui avait décidé cette maison d'édition anarchiste a inviter cet auteur. Dans ce vibrant plaidoyer en faveur de l'autorité et de la tradition on peut en effet lire que « dans un cosmos hiérarchiquement ordonné, prendre place dans une hiérarchie, fût-ce au plus bas degré, n'était pas uniquement servir : c'était également s'inscrire dans le monde, participer à son ordre, ainsi “il faut de tout pour faire un monde” : des puissants et des humbles, jouant chacun leur partition, participant à la plénitude ordonnée du cosmos social ». En septembre 2013, deux mois avant la parution de Radicalité, Olivier Rey publiait lui aussi dans la revue Krisis d'Alain de Benoist [46].

    Conférences pour le Cercle Aristote ou pour le lobby anti-IVG Alliance Vita, apparitions sur TV Liberté, contributions aux magazines Éléments et Krisis, préfaces pour les éditions R&N… Il serait impossible de recenser toutes les collaborations d'Olivier Rey avec des organes néofascistes depuis 2013 tant elles sont nombreuses. Relevons-en simplement quatre : en 2017 Olivier Rey fera partie du comité de rédaction de L'Incorrect, magazine dirigé par Jacques de Guillebon, co-fondateur de Limite et proche de Marion Maréchal-Le Pen, et financé par le thinktank néofasciste L'Avant-Garde [47]. L'Incorrect, L'Avant Garde, Marion Maréchal et tous ceux qui constitueront la base de la campagne électorale d'Eric Zemmour organiseront en 2019 la « Convention de la droite » : Olivier Rey y donnera une conférence intitulée « Seuls les peuples enracinés résistent à l'effondrement ». En 2021 et 2023 Olivier Rey inteviendra au colloque annuel du thinktank néofasciste l'Institut Iliade. Enfin, en 2022, Oliver Rey participera à un débat organisé par la revue Éléments à propos du « Grand Remplacement », en tête à tête avec le principal promoteur de cette théorie, Renaud Camus.

    Cette trajectoire politique marquée par la constance et dépourvue d'ambiguïté n'a en rien empêchée Bertrand Louart de publier plus d'une dizaine de textes d'Olivier Rey sur son site entre 2014 et 2019, ni le collectif Technologos, proche du mouvement anti-industriel, d'inviter Olivier Rey a donné une conférence intitulée « La décivilisation numérique » lors de leurs assises annuelles de 2017. Cette journée d'assises était introduite par François Jarrige et les vigilants éditeurs de L'Échappée, Guillaume Carnino et Cédric Biagini.

    Beaucoup à la sortie de Radicalité se sont étonné·es du fait que les éditeurs ne semblaient pas se poser une seconde la question de ce qui avait permis à un texte rédigé par un fasciste d'être validé par leur soin, ni sur le ‘penseur' à qui ce texte était consacré - Jean-Claude Michéa - qui était loin d'avoir une place marginale dans le livre, en en constituant au moins une boussole [48]. Et c'est la présence de Michéa lui-même qui ne laissait pas d'interroger, indépendamment du fait que sa présentation ait été faite par un fasciste. Cette incompréhension était-elle simplement dû au fait que des personnages comme Marine Le Pen ou Eric Zemmour présentait déjà à l'époque Jean-Claude Michéa comme leur auteur de chevet ? Ou bien à celui que Michéa avait dès 2001 co-signé un livre - Les Valeurs de l'homme contemporain - avec Alain Finkielkraut et Pascal Bruckner, et, à la manière de Renaud Garcia, se saisissait de la moindre occasion pour couvrir de mépris la « lutte contre toutes les discriminations » ?

    Peut-être les éditeurs de L'Échappée n'avaient-ils pas eu le temps de lire le dernier ouvrage de Michéa paru en mars 2013 – Les Mystères de la gauche - dans lequel il faisait dépendre « toute culture authentique » des « frontières géographiques », et le « véritable internationalisme prolétarien » de « ses fondements patriotiques et communautaires ». Peut-être la lecture de L'Empire du moindre mal paru en 2007, où Michéa faisait de l'« extrême gauche » et du Réseaux Éducation Sans Frontière l'avant-garde du Capital et de ce qu'il appelle son « sans-frontiérisme », était quant à elle trop lointaine [49].

    Prenons-donc un ouvrage ni trop proche ni trop loin de 2013 dans la littérature éminemment rébarbative de Jean-Claude Michéa : Le Complexe d'Orphée, paru en 2011. Dans ce livre, qui a pour base sa thèse répétée ad nauseam que le Capital serait bâtit sur la symbiose du libéralisme économique de la droite et du libéralisme culturelle de la gauche (bref de la droite du travail et de la gauche des valeurs), Michéa consacre l'ensemble de l'ouvrage à attaquer l'« illimitation » et le « refus du passé », proprement « libéraux », de « la gauche et de l'extrême-gauche » [50].

    C'est ainsi qu'il attaque une gauche coupable selon lui de combattre « tous les signes d'une vie collective enracinée dans une culture particulière » et de « célébrer à l'infini la transgression de toutes les limites morales et culturelles léguées par les générations antérieures ». « L'univers liquide dont rêvent Badiou, le Medef et les “sans-frontiéristes” » conduirait, toujours selon Michéa, au « déracinement généralisé » et à une « conception désincarnée (ou transgenre) de l'universel ». Il défend donc la vision d'« une société socialiste décente » qui devra « maintenir un secteur privé et, par conséquent, un nombre, probablement important, d'entreprises privées », pour lutter contre « le capitalisme sans frontières – machine dont les élites déracinées, incultes et perpétuellement mobiles s'emploient, depuis maintenant des décennies, à dissoudre la prodigieuse diversité des civilisations existantes ». Cela l'amène à consacrer plusieurs pages à la défense d'Eric Zemmour face à ce qu'il nomme « la police de la pensée ».

    Sa thèse majeure, celle d'une gauche congénitalement « libérale », repose sur une source principale, citée dès la première page de l'ouvrage : une « étude magistrale », d'un certain Marc Crapez, paru en 2009, dans la revue Krisis. Celle d'Alain de Benoist.

    Comment un Charles Robin ne serait-il pas à son aise dans une pensée aussi furieusement nationaliste et saturée de schèmes antisémites ? Mais surtout, comment cette pensée raciste et patriarcale a pu se diffuser autant et devenir matricielle au cours des années 2000 dans certains milieux anarchistes, alors que la seule chose que Michéa ait en commun avec l'anarchisme est l'usage du mot dans le titre d'un de ses livres ?

    Dans les années qui suivirent, Kevin Boucaud-Victoire déclarera dans les colonnes de Limite que « Le livre Radicalité : 20 penseurs vraiment critiques publié par L'Échappée en 2013 est presque une Bible pour nous ».
    Alain de Benoist confiera que « dans le paysage intellectuel français, celui dont je me sens le plus proche, c'est quand même Jean-Claude Michéa ».
    Et Charles Robin écrivit pour la revue Krisis un papier intitulé La sagesse anarchiste.

    Faire face à nos responsabilités

    Vous en conviendrez aisément, cette histoire n'a que trop duré. La tâche étant des plus pénibles, elle ne pouvait être réalisée à moitié. Concluons cette traversée d'un naufrage en compagnie de celui qui l'a inaugurée, le contributeur de la revue Brasero, Paul Cudenec, qui quelques semaines à peine après la sortie de la revue des éditions L'Échappée publiait un nouvel ouvrage intitulé Les Ennemis du Peuple : les Rothschilds et leur Empire Global corrompu [51].

    En juillet 2023 PMO invitent leurs lecteur·ices à se rendre aux rencontres estivales annuelles de leurs ami·es de Resistenze al Nanomondo [52]. Du 27 au 29 juillet des conférences et animations sont programmées lors de ces « trois jours contre la techno-science ». Vincent Cheynet, Jacques Luzi et Paul Cudenec y sont programmés comme conférenciers. Le samedi 28 Jacques Luzi fait donc un exposé sur « Biotechnologie, PMA et eugénisme » tandis que Vincent Cheynet se demande s'il « existe une matrice du "phénomène trans", du transhumanisme, du transsexualisme ? » [53].

    La veille ils ont pu assister à la projection d'Infertilité : un plan diabolique, un « documentaire » réalisé par la star historique des mouvements antivax Andrew Wakefield, et produit par Robert Kennedy Jr, figure importante du mouvement antisémite Qanon et candidat libertarien à la présidentielle américaine, ayant reçu le soutien public des milliardaires Jack Dorsey et Elon Musk. Ce « documentaire » diffusé par le lobby Children's Health Defense, dirigé par Kennedy, affirme qu'après que l'OMS « sous le couvert d'un programme de vaccination contre le tétanos, a conduit à la stérilisation de millions de femmes en Afrique », désormais « les vaccins génétiques contre le Covid-19 sont susceptibles de provoquer la stérilité des femmes dans le monde entier. »

    Paul Cudenec, quant à lui, donne une conférence intitulée « Faire la lumière sur le climat de manipulation ». Dans celle-ci il développe la thèse que, selon lui, « le fait que les mouvements pour la “justice climatique” et les “droits des trans” soient des faux drapeaux pour les intérêts financiers des entreprises n'est pas une coïncidence, mais fait partie d'un plan systématique et de grande envergure ». Il ouvre son propos en avançant qu'il est difficile de trancher entre la position d'une certaine Cory Morningstar « selon laquelle le changement climatique d'origine humaine est bien réel, mais qu'il a été systématiquement exploité à des fins nettement non écologistes par le capitalisme mondial », et celle de « l'affable scientifique anglais » Piers Corbyn qui « affirme qu'il n'y a pas de réchauffement climatique provoqué par l'homme » [54].

    ⁂ ⁂ ⁂

    Ces dix dernières années ont vu progresser de manière fulgurante l'extrême-droite internationale et les dynamiques réactionnaires et autoritaires, propulsées par les ravages de l'offensive capitaliste néolibérale. Tout en maquillant leur antisémitisme constitutif sous un anticapitalisme de pacotille et les artifices langagiers anciens de l'« élite mondialiste » ou de l'« oligarchie mondiale », les fractions d'extrême-droite de la bourgeoisie ont capitalisées pendant des années sur l'intensification de l'islamophobie extérieure et intérieure. Réussissant ainsi à capter une partie des angoisses d'une classe moyenne blanche en voie de paupérisation.

    La pandémie de Covid-19 a été l'occasion d'élargir considérablement leur audience bien au-delà des sympathisants sensibles de prime abord aux discours racistes, tout en revitalisant un antisémitisme et un eugénisme décompléxé. À travers certains de leur représentants à la tête de puissances capitalistes mondiales comme Trump, Bolsonaro, Modi ou Johnson, mais aussi par la construction d'une miriade de mouvements fascisants comme Réinfocovid, iels se sont battu pour promouvoir l'infection de masse, pour l'abandon des personnes vulnérables, sureprésentées parmi les classes populaires et racisées, pour que prévale « la loi de la nature » et du profit, pour retrouver l'ancienne normalité. Appuyant ainsi le programme porté par le néolibéralisme de destruction continue des systèmes de solidarité et de toute forme d'autodéfense populaire.

    Une fois les dommages de la pandémie invisibilisés et naturalisés par les néolibéraux grâce aux outils forgé par l'extrême-droite libertarienne, les fractions d'extrême-droite de la bourgeoisie, fortes d'arrivées nombreuses dans leurs rangs, ont relancé de nouvelles offensives. Certaines de ces offensives se sont concentrées d'abord sur les personnes trans, selon la stratégie typique de l'extrême-droite de s'en prendre d'abord aux personnes les plus fragilisées socialement. À travers les personnes trans c'est l'ensemble des minorités de genres et de sexualités, le mouvement féministes, et les droits reproductifs qui sont visés pour y opposer l'orde supposément « naturel » de la famille. En témoigne les violentes vagues d'attaques, en France et à l'international, contre le Planning Familial et le droit à l'avortement au cours de l'année 2022. Ces attaques ont été portées par l'extrême-droite historique ainsi que par la multitude de nouveaux satellites créent dans les premières années de la pandémie.

    Enfin cette campagne contre les personnes trans et le féminisme, qui reprend bien des éléments de l'antisémitisme (le mythe de la minorité privilégiée, celui du « Lobby » tentaculaire, quand ce n'est pas directement des listes de personnes juives), a trouvé à se prolonger dans l'offensive plus générale et continue de l'extrême-droite contre les luttes d'émancipation, cette fois-ci affublée des oripeaux d'un vocable tout droit emprunté aux forces néofascistes américaines : le « wokisme ». Derrière l'épouvantail du « wokisme » agité par les partisans autoritaires de la reproductions des hiérachies sociales, c'est l'éternelle opération d'étouffement des luttes populaires contre les dominations capitalistes, coloniales et patriarcales, qui se rejoue (pour les épisodes précédents voir « islamo-gauchisme », « politiquement correcte », « dictature des minorités »).

    Dans un contexte mondial où s'entrelacent crises écologiques, économiques, pandémiques et géopolitiques, l'ordre suprémaciste, patriarcal et eugéniste vendu par l'extrême-droite internationale qui a déjà conquis de larges pans de la bourgeoisie séduit des secteurs importants de la classe moyenne qui espèrent retrouver l'ancienne normalité. Hier comme aujourd'hui les fractions d'extrême-droite de la bourgeoisie recrutent en ouvrant des fronts, en menant des offensives, en surjouant la révolte. Une révolte pour enraciner et renforcer de l'ordre dominant.

    ⁂ ⁂ ⁂

    Comme nous l'avons vu, et aussi hallucinant que cela puisse paraître, depuis plusieurs années le mouvement anti-industriel a relayé chacune de ces offensives au sein même des espaces de luttes. Comme nous l'avons vu également, Pièces et Main d'Oeuvre, loin d'avoir été marginalisé·es par leurs sorties racistes, anti-trans, homophobes et anti-féministes sont au contraire reconnu·es et valorisé·es par l'ensemble de ce mouvement. PMO n'est pas l'exception mais la norme.

    Le refus d'analyser et combattre la multiplicité des systèmes de domination qui structurent le capitalisme au profit d'une vision indigente opposant un sujet soi-disant unifié – les humain·es ou les vivant·es – face au « technototalitarisme » produit un terreau hautement favorable à la naturalisation des hiérarchies sociales. D'autant plus quand cela croît dans une atmosphère d'essentialisation et de fascination pour « la Nature », désormais vendu sous l'emballage du « Vivant ». Nous n'avons nul besoin de ces impasses essentialistes et autoritaires pour mener une critique conséquente du capitalisme industriel.

    Quand des acteur·ices se révendiquant de l'anarchisme et des luttes populaires travaillent activement a importer des logiques autoritaires et réactionnaires au sein des espaces de luttes, alors même que l'extrême-droite devient chaque jour plus hégémonique, cela provoque une porosité avec le pire, des divisions dans les collectifs de lutte, et mène à un affaiblissement général porteur des plus grands dangers.

    Tout cela devrait constituer un signal d'alarme fort et pousser l'ensemble des acteur·ices des luttes populaires d'émancipation à ne pas seulement « appeler à la vigilance » mais à s'organiser concrêtement pour qu'aucune passerelle ne soit établie entre nos mouvements et des courants antisémites, antitrans, racistes, validistes, antiféministes, nationalistes, et les personnes qui pourraient être complaisantes à leur égard.

    De toute urgence, il nous faut élever des digues.
    Chacun·e doit faire face à ses responsabilités.

    Août 2023

    Bibliographie

    [Podcast] Bilan critique du courant anti-industriel, Zoom Ecologie, novembre 2022, paris-luttes.info [https://paris-luttes.info/podcast-bilan-critique-du-courant-16402]

    Sur la dérive réactionnaire de certain·es « compagnon·nes », Des anarchistes, août 2021, mars-infos.org [https://mars-infos.org/sur-la-derive-reactionnaire-de-5879]

    Ce que les queers ont à dire de la technique. Repenser la technocritique à partir d'expériences minoritaires, Cy Lecerf Maulpoix, octobre 2022 Revue du Crieur 21 [https://www.cairn.info/revue-du-crieur-2022-2-page-108.htm]

    Masculinisme : Quand les femmes « oppressent » les hommes, Anaïs et Benoit, mai 2020, UCL [https://www.unioncommunistelibertaire.org/Masculinisme-Quand-les-femmes-oppressent-les-hommes]

    · Pièce et Main d'Oeuvre

    Pièce et main d'oeuvre, dérive à l'extrême droite, décembre 2021, labogue.info [https://labogue.info/spip.php?article1139]

    Le coming out masculiniste de Pièces et main d'oeuvre, Collectif Stop-Masculinisme, janvier 2015, infokiosques.net [https://infokiosques.net/spip.php?article1741]

    Critique radicale du collectif Pièces et main d'œuvre. A propos du texte « Ceci n'est pas une femme (à propos des tordus queer) », mais 2021, lepoing.net [https://lepoing.net/critique-radicale-du-collectif-pieces-et-main-doeuvre-a-propos-du-texte-ceci-nest-pas-une-femme-a-propos-des-tordus-queer2/]

    Dossier sur « le glissement de PMO vers des positions homophobes, anti-féministes et réactionnaires », Timult 8, septembre 2014 [https://timult.poivron.org/08/]

    Contre PMO et son monde, juin 2022, Indymedia Lille [https://lille.indymedia.org/spip.php?article34769]

    · Sur l'ouvrage Radicalité, ses contributeurs et Jean-Claude Michéa

    Commentaires sur l'ouvrage collectif « Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques », Max Vincent, mars 2014 [http://lherbentrelespaves.fr/index.php?post/2014/03/19/Commentaires-sur-l-ouvrage-collectif-Radicalit%C3%A9%2C-20-penseurs-vraiment-critiques]

    A propos du réac Jean-Claude Michéa (alias Nietzschéa), des Editions l'Echappée et de leur « vigilance »... en carton pâte, novembre 2013, mondialisme.info [https://web.archive.org/web/20210512120834/http://www.mondialisme.org/spip.php?article1990]

    Conversation sur les spécialistes radicaux des penseurs radicaux, Radio Vosstanie, novembre 2013 (retranscription février 2014) [https://vosstanie.blogspot.com/2014/02/conversation-sur-les-specialistes.html]

    Contre la récupération de l'écologie par l'extrême droite (sur Olivier Rey), mai 2020, paris-luttes.info [https://paris-luttes.info/contre-la-recuperation-de-l-13536]
    L'union radicale conservatrice et ses limites, Ève Gianoncelli, septembre 2020, Mots [https://journals.openedition.org/mots/26632]

    Au nom du peuple. J-C. Michéa réécrit l'histoire, Isabelle Garo, janvier 2015, Contretemps [https://www.contretemps.eu/au-nom-du-peuple-j-c-michea-reecrit-lhistoire/]

    Critique radicale de Michéa : glorification de la valeur d'usage, critique tendancieuse du libéralisme culturel, récupération par les rouges-bruns, Benoit Bohy Bunel, mai 2017 [http://benoitbohybunel.over-blog.com/2017/05/critique-radicale-de-michea-glorification-de-la-valeur-d-usage-critique-tendancieuse-du-liberalisme-culturel-recuperation-par-les-ro]

    « Vous connaissez Michéa ? » : quelques rappels fondamentaux à propos de l'idéologie du site Ragemag, Noe Clectic, octobre 2021, Lignes de crête [https://www.lignes-de-cretes.org/vous-connaissez-michea-quelques-rappels-fondamentaux-a-propos-de-lideologie-du-site-ragemag-ragemag-episode-1/]

    · Sur l'offensive anti-trans

    L'offensive anti-trans est un cheval de Troie contre les droits des femmes, Toutes Des Femmes, Nous Toutes et Le RAAR, novembre 2022, tribune médiapart [https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/171122/l-offensive-anti-trans-est-un-cheval-de-troie-contre-les-droits-des-femmes]

    Planning familial : les anti-trans, « cautions progressistes » des réacs, Pauline Bock, septembre 2022, Arrêt sur images [https://www.arretsurimages.net/articles/planning-familial-les-anti-trans-cautions-progressistes-des-reacs]

    [Video] Comment la droite réactionnaire construit une « question trans » ?, Toutes de Femmes et XY Media, juin 2022 [https://toutesdesfemmes.fr/comment-la-droite-reactionnaire-construit-une-question-trans/]

    Comment l'extrême-droite transforme les féministes en fascistes, Jude Ellison S. Doyle, traduction juillet 2022, Blog des Potates [https://blog.potate.space/comment-lextreme-droite-transforme-les-feministes-en-fascistes/]

    Trans n'est pas transhumanisme, Alex B, octobre 2018, Infokiosques.net [https://infokiosques.net/spip.php?page=lire&id_article=1805]

    L'éradication des « abstractions talmudiques » : l'antisémitisme, la transmisogynie et le projet nazi, Joni Alizah Cohen, juin 2019, Contretemps [https://www.contretemps.eu/antisemitisme-transmisogynie-nazisme/]

    Compte-rendu de Dommages irréversibles d'Abigail Shrier, mai 2022, Blog des Potates [https://blog.potate.space/review-livre-transphobe-shrier/]

    · La Décroissance, Floraisons, DGR, Editions Libre, Paul kingsnorth, Le Comptoir…

    La Décroissance : quand le « journal de la joie de vivre » courtise la fachosphère, Aude Vidal, avril 2021, blog médiapart [https://blogs.mediapart.fr/audevidal/blog/300421/la-decroissance-quand-le-journal-de-la-joie-de-vivre-courtise-la-fachosphere]

    La Décroissance, ce journal que nous n'achèterons pas, juillet 2019, rebellyon.info [https://rebellyon.info/La-decroissance-ce-journal-que-nous-n-20957]

    Pas d'éco-terfs dans nos luttes ! Floraisons et DeepGreenResistance ne viendront pas à la Maison de l'écologie, ni ailleurs !, novembre 2022, rebellyon.info [https://rebellyon.info/Pas-d-eco-terfs-dans-nos-luttes-24294]

    Nicolas Casaux et la transphobie par Peter Gelderloos, novembre 2019, rebellyon.info [https://rebellyon.info/Nicolas-Casaux-et-la-transphobie-par-21327]

    Deep Green Resistance, des réactionnaires à l'assaut de l'écologisme français, janvier 2019, Revolutionnary Democracy [https://revolutionarydemocracy.wordpress.com/2019/01/24/deep-green-resistance-des-reactionnaires-sinfiltrant-dans-le-mouvement-ecologiste-francais/]

    L'imposture Deep Green Resistance, juillet 2022, le-social.club [https://www.le-social.club/limposture-deep-green-resistance-partie-1-un-reseau-meconnu/]

    Pourquoi Expansive suspend la publication des articles proposés par Deep Green Resistance, janvier 2022, expansive.info [https://expansive.info/Pourquoi-Expansive-suspend-la-publication-des-articles-proposes-par-Deep-Green-3049]

    Les mensonges de la terre, Contre l'écologie völkisch de Paul Kingsnorth, Collectif Out of the Woods, mars 2017, traduction publiée en 2023 dans L'utopie maintenant !, éditions Présence(s) [texte original :https://libcom.org/article/lies-land-against-and-beyond-paul-kingsnorths-volkisch-environmentalism]

    Écologie transphobe et proto-fascisme (de Paul Kingsnorth), John Halstead, mars 2023, cric-grenoble.info [https://cric-grenoble.info/analyses/article/ecologie-transphobe-et-proto-fascisme-2891]

    · Réinfocovid

    Qui sont les animateurs de Reinfocovid ?, juin 2021, La Horde [https://lahorde.samizdat.net/Qui-sont-les-animateurs-de-Reinfocovid]

    Lettre à propos de ReinfoCovid, mai 2021, paris-luttes.info [https://paris-luttes.info/lettre-a-propos-de-reinfocovid-15012]

    À propos de la projection du film « Tous résistants dans l'âme », février 2023, iaata.info [https://iaata.info/A-propos-de-la-projection-du-film-TOUS-RESISTANTS-DANS-L-AME-5698.html]


    [1] Commentaires sur l'ouvrage collectif « Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques », Max Vincent, mars 2014 (Lien en Bibliographie)

    [2] De la popullulation, PMO, novembre 2004 [www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?page=resume&id_article=19]

    [3] La notion de « mouvement anti-industriel » est employée par Miguel Amoros et Renaud Garcia (in Le Désert de la critique) quand Patrick Marcolini parle lui de « mouvance anti-industrielle » : « la mouvance qu'on nomme – en fait, qui se nomme elle-même – "anti-industrielle " » [sniadecki.wordpress.com/2023/06/14/marcolini-ancre/]

    [4] Fascism Rebranded : Exposing the Great Reset, juillet 2021, Winter Oak ; Who's behind the fake-left vaccine gang ?, octobre 2021, Winter Oak ; Klaus Schwab and his great fascist reset, octobre 2020, Winter Oak

    [5] Voir notamment Klaus Schwab and his great fascist reset, octobre 2020, Winter Oak ; Controlling the left : the impact edgenda, février 2021, Winter Oak ; The Great Reset Phase 2 : War, mars 2022, Winter Oak ; Who's behind the fake-left vaccine gang ?, octobre 2021, Winter Oak.

    [6] Voir Canada : the “anarchists” who hate freedom uprisings, février 2022, Winter Oak ; Resistance : rupture and rebirth, février 2022, Winter Oak ; France rises up against the new fascism, juillet 2021, Winter Oak ; Liberté ! Résistance ! A photo-report from France, juillet 2021, Winter Oak

    [7] La Rose Blanche : de l'extrême-droite à l'agonie populaire, Ricardo Parreira, juillet 2021, La Mule du Pape [https://www.lamule.media/2021/07/30/la-rose-blanche-de-lextreme-droite-a-lagonie-populaire/] ; La Rose Blanche, la décadence d'un réseau Qanon, Ricardo Parreira, janvier 2022, La Mule du Pape [www.lamule.media/2022/01/10/la-rose-blanche-la-decadence-dun-reseau-qanon/] ; Qui sont les animateurs de Reinfocovid ?, juin 2021, La Horde [lahorde.samizdat.net/Qui-sont-les-animateurs-de-Reinfocovid]

    [8] Our insurrection will be impure !, Paul Cudenec, février 2022, Winter Oak

    [9] Un « Manifeste conspirationniste » attribué à Julien Coupat publié par l'extrême droite allemande, Maxime Macé, Pierre Plottu, Libération [www.liberation.fr/politique/un-manifeste-conspirationniste-attribue-a-julien-coupat-publie-par-lextreme-droite-allemande-20230208_PTWS2TML3RDCZO2E2SZAIQG7MU]

    [10] Dialogo tra Resistenze al nanomondo e Paul Cudenec, juillet 2022, L'Urlo de la Terra [www.resistenzealnanomondo.org/necrotecnologie/dialogo-tra-resistenze-al-nanomondo-e-paul-cudenec/] ; Version anglaise : Resisting techno-tyranny : a dialogue, décembre 2022, Winter Oak [winteroak.org.uk/2022/12/02/resisting-techno-tyranny-a-dialogue/]

    [11] Rapiécer le monde. Les éditions La Lenteur contre le déferlement numérique, François Jarrige, novembre 2019, Terrestres [www.terrestres.org/2019/12/20/rapiecer-le-monde-les-editions-la-lenteur-contre-le-deferlement-numerique/]

    [12] Site Sniadecki : ‘Matthieu Amiech, L'Industrie du complotisme', juillet 2023 [sniadecki.wordpress.com/2023/07/06/amiech-complotisme/]

    [13] Contre l'islamisme, ni “Causeur” ni “Crieur”, Matthieu Amiech, octobre 2016, Le Monde.

    [14] Matthieu Amiech : « La gestion de la crise sanitaire nous entraîne vers une société-machine », Amélie Poinssot, mars 2021, Médiapart [www.mediapart.fr/journal/ecologie/130321/matthieu-amiech-la-gestion-de-la-crise-sanitaire-nous-entraine-vers-une-societe-machine]

    [15] Morts du Covid-19 : la pauvreté, une comorbidité sous-estimée, Antoine Beau, avril 2021, HuffingtonPost [www.huffingtonpost.fr/science/article/morts-du-covid-19-la-pauvrete-une-comorbidite-sous-estimee_179766.html] ; Covid-19 : excès de mortalité parmi les immigrés, Myriam Khla, Walid Ghosn, Michel Guillo, Stéphanie Vandentorren, juin 2023, Plein droit [www.cairn.info/revue-plein-droit-2023-2-page-10.htm]

    [16] So, is it all right to be an English nationalist ?, Paul Kingsnorth, avril 2008, The New Statesman [www.newstatesman.com/long-reads/2008/04/english-england-british]

    [17] Les mensonges de la terre, Contre l'écologie völkisch de Paul Kingsnorth, Collectif Out of the Woods, mars 2017 (Lien en Bibliographie)

    [18] Le déni idéologique du réel sera le plus difficile à abattre, Alexandra Laignel-Lavastine, décembre 2015, Valeurs Actuelles ; Face à l'islamisme, certains intellectuels « progressistes » sont dangereux, Alexandra Laignel-Lavastine, juin 2015, FigaroVox

    [19] "La Déraison sanitaire" d'Alexandra Laignel-Lavastine : un essai puissant sans masque ni oeillères, décembre 2020, Atlantico ; Confinement : « Nos héritiers nous reprocheront notre irresponsabilité », Alexandre Devecchio, novembre 2020, Le Figaro

    [20] Covidoscepticisme, Vichy et déni climatique : la recette des éditions de L'Artilleur, François Vaneeckhoutte, avril 2023, Libération [www.liberation.fr/checknews/covidoscepticisme-vichy-et-deni-climatique-la-recette-des-editions-de-lartilleur-20230407_VOTANWQR6JGFFNKX6EWZUMC6UI/]

    [21] La vérité sur l'écofascisme, Paul Kingsnorth, janvier 2023, Sniadecki [sniadecki.wordpress.com/2023/01/06/kingsnorth-ecofascisme/]

    [22] sniadecki.wordpress.com ; La religion du progrès, Floraisons [floraisons.blog/la-religion-du-progres/]

    [23] Boris Johnson adviser under fire for praise of Hungary's Viktor Orban, George Parker, janvier 2020, Financial Times

    [24] À propos de UnHerd voir Disaffected Right, Making Sense of UnHerd, Josh White, juin 2023, The Battleground [thebattleground.eu/2023/06/12/disaffected-right/] ; Red Tory to Blue Labour, How Spiked and Unherd are Keeping National Populism Alive, Jon Bloomfield, David Edgar, décembre 2022, Byline Times [bylinetimes.com/2022/12/07/red-tory-to-blue-labour-how-spiked-and-unherd-are-keeping-national-populism-alive/] ; Fighting Back Against National-Populism, Jon Bloomfield, David Edgar, décembre 2022, Byline Times [bylinetimes.com/2022/12/19/fighting-back-against-national-populism/]

    [25] Cf. Bibliographie, notamment Pas d'éco-terfs dans nos luttes ! Floraisons et DeepGreenResistance ne viendront pas à la Maison de l'écologie, ni ailleurs !, novembre 2022, rebellyon.info ; Planning familial : les anti-trans, « cautions progressistes » des réacs, Pauline Bock, septembre 2022, Arrêt sur images

    [26] À propos du Manifeste conspirationniste, Nicolas Bonanni, octobre 2022, Sniadecki

    [27] Chi finanzia il movimento LGBTQ, Silvia Guerini, juin 2023, AcroPolis [www.acro-polis.it/2023/06/08/chi-finanzia-il-movimento-lgbtq/]

    [28] Don de tissus foetaux : le planning familial répond aux accusations des « pro-life », Stéphany Gardier, juillet 2015, Fréquence Médicale [www.frequencemedicale.com/urologie/patient/3829-Don-de-tissus-foetaux-le-planning-familial-repond-aux-accusations-des-pro-life]

    [29] Sur la dérive réactionnaire de certain·es « compagnon·nes », Des anarchistes, août 2021, mars-infos.org (Lien en Bibliographie)

    [30] Quando un mucchio di letame risulta positivo al tampone, Resistenze al nanomondo, avril 2021

    [31] Gaëtan Flocco et Fabrice Colomb ont pris personnellement la défense de Laurent Muchielli lorsqu'un de ses billet de blog a été dépublié par Médiapart et que le CNRS s'est désolidarisé de son chercheur, du fait qu'il désinformait de manière plus outrancière que d'habitude au sujet de la vaccination : « La sociologie ne consiste pas à faire la chasse aux sorcières mais à débattre », Gaëtan Flocco, Fabrice Colomb, août 2021.

    [32] Une revue à un carrefour, Renaud Bécot, Fabrice Flipo, Laurent Garrouste, Benoît Morange, décembre 2022, Terrrestres [www.terrestres.org/2022/12/12/une-revue-a-un-carrefour/]

    [33] The Voice of the System, Paul Cudenec, janvier 2023, TruthTalk [truthtalk.uk/2023/the-voice-of-the-system/]

    [34] Jacques Luzi : « La procréation technologiquement assistée est une médecine transhumaniste », Kévin Boucaud-Victoire, mars 2023, Le Comptoir [comptoir.org/2023/03/13/jacques-luzi-la-procreation-technologiquement-assistee-est-une-medecine-transhumaniste/]

    [35] La Décroissance : quand le « journal de la joie de vivre » courtise la fachosphère, Aude Vidal, avril 2021, blog médiapart ; La Décroissance, ce journal que nous n'achèterons pas, juillet 2019, rebellyon.info · (Liens en Bibliographie)

    [36] L'hebdo Marianne se voit-il encore à gauche ?, Pauline Bock, juin 2021, Arrêt sur image [www.arretsurimages.net/articles/lhebdo-marianne-se-voit-il-encore-a-gauche]

    [37] Le Printemps Républicain, la social-démocratie au service de l'extrême droite, Antoine Grégoire, mai 2018, Lignes de Crêtes [www.lignes-de-cretes.org/le-printemps-republicain-la-social-democratie-au-service-de-l-extreme-droite/ ] ; « Vous connaissez Michéa ? » : quelques rappels fondamentaux à propos de l'idéologie du site Ragemag, Noe Clectic, octobre 2021, Lignes de Crêtes (Lien en Bibliographie)

    [38] Délivrez-nous du bien ! - Halte aux nouveaux inquisiteurs, Natacha Polony, Jean-Michel Quatrepoint, 2018, éditions de L'Observatoire

    [39] Les mots et les réalités, Colette Chiland, 2011, L'information psychiatrique [www.cairn.info/revue-l-information-psychiatrique-2011-4-page-261.htm] ; À propos de Chiland voir aussi Des « psys », des théories et de la transphobie, in Sociologie de la Transphobie, Arnaud Alessandrin, Karine Espineira, novembre 2019, Maison des Sciences de l'Homme d'Aquitaine [books.openedition.org/msha/4875]

    [40] Le Droit à l'oncle, Anselm Jappe, avril 2021, blog Mediapart [blogs.mediapart.fr/anselm-jappe/blog/190421/le-droit-loncle], réédité dans Soleil noir, Anselm Jappe, novembre 2021, Crise et critique.

    [41] Haben Sie „Gesundheitsdiktatur“ gesagt ?, Anselm Jappe, janvier 2022, Wertkritik und Krisentheorie [wertkritik.org/beitraege/jappe-haben-sie-gesundheitsdiktatur-gesagt]

    [42] Renaud Garcia : « Le militantisme “woke” ne cherche pas à convaincre mais à régenter la vie des autres », Kévin Boucaud-Victoire, novembre 2021, Le Comptoir [comptoir.org/2021/11/16/renaud-garcia-le-militantisme-woke-ne-cherche-pas-a-convaincre-mais-a-regenter-la-vie-des-autres/]

    [43] [Intégralité du communiqué “Les Éditions de L'Échappée appellent à la vigilance” (novembre 2013) :
    “Il a été porté à notre connaissance qu'un auteur d'un texte du livre collectif Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques, publié aux Éditions de L'Échappée et actuellement en librairie, entretenait des relations avec des structures proches de la mouvance d'Alain Soral. Cet auteur, Charles Robin, nous avait été recommandé par une personne de confiance, clairement engagée à gauche, initialement pressentie pour écrire le texte en question, et qui faute de temps n'a pas pu le faire. Cette personne n'étant en rien au courant des accointances de Charles Robin, et a été tout autant choquée que nous lorsque nous le lui avons appris. Notre erreur aura été de ne pas nous renseigner sur Charles Robin (nous ne l'avons même pas googlisé !), et la teneur de son texte ne pouvait en rien laisser présager de ses fréquentions politiques.
    En temps de crise l'extrême droite a pour stratégie de tenter des rapprochements avec l'autre bord de l'échiquier politique. Nous en appelons donc à la vigilance, afin qu'aucune passerelle ne soit établie entre nos mouvements et des courants antisémites, racistes, antiféministes, nationalistes, conspirationnistes, etc., etc., et les personnes qui pourraient être complaisantes à leur égard”.]

    [44] Nous et les autres, problématique de l'identité, Alain de Benoist, 2006, Krisis

    [45] Dany-Robert Dufour : « Nous nous sommes embarqués dans une escalade de l'horreur », Kevin Boucaud-Victoire, mars 2017, Le Comptoir [comptoir.org/2017/03/13/dany-robert-dufour-nous-nous-sommes-embarques-dans-une-escalade-de-lhorreur/]

    [46] Page personnel d'Olivier Rey sur le site de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne [www.pantheonsorbonne.fr/page-perso/orey]

    [47] L'Avant-Garde, ou comment vouloir garder ce qu'il y avait avant, septembre 2017, La Horde [lahorde.samizdat.net/lavant-garde-ou-comment-vouloir-garder-ce-quil-y-avait-avant]

    [48] Voir Commentaires sur l'ouvrage collectif « Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques », Max Vincent, mars 2014 (Lien en Bibliographie)

    [49] Les Mystères de la gauche, Jean-Claude Michéa, mars 2013, Climats ; L'Empire du moindre mal, Jean-Claude Michéa, septembre 2007, Climats

    [50] Le Complexe d'Orphée : La gauche, les gens ordinaires et la religion du progrès, Jean-Claude Michéa, octobre 2011, Climats

    [51] Enemies of the People, The Rothschilds and their Corrupt Global Empire, décembre 2022, Winter Oak

    [52] Naissance, nature et liberté, Pièces et main d'œuvre, juin 2023 [www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?page=resume&id_article=1855]

    [53] Programma tre giornate contro le tecno-scienze 28-29-30 luglio, Resistenze al Nanomondo [www.resistenzealnanomondo.org/necrotecnologie/biotecnologie/programma-tre-giornate-contro-le-tecno-scienze-28-29-30-luglio/]

    [54] Fare luce sul clima di manipolazione, Paul Cudenec, Resistenze al Nanomondo [www.resistenzealnanomondo.org/necrotecnologie/fare-luce-sul-clima-di-manipolazione-paul-cudenec/] ; En anglais : Shining light on the climate of manipulation, Paul Cudenec, juillet 2023 [winteroak.org.uk/2023/07/31/shining-light-on-the-climate-of-manipulation/]



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  • Saturday 18 November 2023 - 00:30

    Cet article a été publié par Alain Bujard en décembre 2015 dans le Cahier d'Histoire Sociale de l'IHS Rhône-Alpes. Il est extrait des pages consacrées au mouvement ouvrier dans la Loire avant la création des syndicats (ndFI).

    La grève des passementiers de Saint-Étienne se préparait depuis plusieurs années. L'insurrection des canuts lyonnais, en 1831, avait fortement influencé les passementiers de Saint-Étienne. Ces deux grandes villes, distantes de moins de soixante kilomètres, étaient déjà reliées par un chemin de fer. L'industrie du ruban, à Saint-Étienne, et celle des soieries de Lyon groupaient le même nombre d'ouvriers ; c'étaient deux industries sœurs. Le travail s'effectuait de la même façon et les conditions de travail étaient semblables.

    Cependant, les passementiers de Saint-Étienne subissaient l'ascendant des canuts lyonnais qui jouissaient du prestige de l'émeute de novembre 1831 où ils avaient pendant quelques jours été les maîtres de la ville.

    D'autre part, ces derniers étaient bien organisés. La plupart des chefs d'ateliers appartenaient à la société “Mutualiste” dont l'influence fut prépondérante dans l'insurrection de 1831. Quant aux ouvriers, beaucoup appartenaient à la société “Les Ferrandiniers”.

    Des journaux paraissant à Lyon défendaient les tisseurs. Le plus important était “L'Echo de la Fabrique” qui devint par la suite l'organe du “Mutualiste”. L'Echo des travailleurs s'occupait plus particulièrement des intérêts des ouvriers. Deux autres journaux, “Le Précurseur” et “La Glaneuse”, défendaient les tisseurs, surtout contre les attaques d'un autre journal réactionnaire : “Le Courrier de Lyon”.

    Enfin, pendant les années qui précédèrent le conflit, plusieurs contacts eurent lieu entre les canuts et les passementiers de Saint-Étienne pour organiser l'action destinée à arrêter la baisse des salaires et même à en imposer la hausse.

    L'effervescence qui avait gagné les passementiers de Saint-Étienne lors de l'insurrection lyonnaise de 1831 s'était calmée pendant les mois qui suivirent la répression. Cependant en 1832, divers incidents furent le signe avant-coureur du malaise qui existait dans l'industrie du ruban.

    D'ailleurs, les pouvoirs publics de la région s'inquiétaient de l'état d'esprit des passementiers et de la suite de l'émeute de Rives. Le procureur du Roi écrivait à l'époque au Ministre de la Justice : “Il n'y a qu'une classe d'ouvriers fort nombreuse, les passementiers, contre lesquels nous devons sans cesse nous tenir en garde. S'ils levaient l'étendard de la révolte, ce ne serait que pour se livrer au pillage. Leur misère est fort grande en ce moment, mais ils sont loin d'avoir l'audace et l'esprit d'insubordination qu'on a toujours remarqué chez les ouvriers canonniers”.

    En janvier 1832, un membre de cette corporation, Drivon, publia une brochure sur la situation des ouvriers passementiers. Dans ce document prophétique, l'auteur invitait les fabricants, s'ils voulaient éviter une répétition des événements de novembre à Lyon “à porter une main réparatrice aux abus”. Dans un esprit d'ordre, il demandait aux ouvriers “de ne pas écouter les suggestions subversives que pouvaient leur inspirer les souffrances et les besoins dont ils étaient assiégés.”

    Ces conseils de sagesse n'eurent aucun effet. En 1833, la baisse des salaires qui se pratiquaient depuis quelques années s'accentua. Les ouvriers adressèrent des plaintes et des rapports à la sous-préfecture sans obtenir de résultat.

    Pourtant le lieutenant de gendarmerie, Faucheux, chargé par le Sous-Préfet d'enquêter sur la question déclarait dans son rapport : “il faut dire la vérité, l'ouvrier souffre”. Le Sous-Préfet Mollard, qui suivait de très près la marche du mouvement, se rendait compte que l'agitation allait en s'aggravant. Ses rapports au Préfet Bret étaient empreints d'un certain pessimisme. Néanmoins, par tactique, il s'opposait aux poursuites judiciaires demandées par le Préfet qui accusait les passementiers d'avoir partie liée avec les mutualistes lyonnais.

    L'organisation des Passementiers

    Devant cette situation, l'idée d'organisation se développa chez les passementiers. Comme chez leurs camarades de Lyon, l'association leur semblait le seul moyen de défendre leurs intérêts. Dès le début de 1833, fut fondée “La société mutuelle de secours”, formée par les chefs d'ateliers passementiers de la ville de Saint-Étienne. A son début, cette société n'avait qu'un caractère mutualiste. Son but était de donner des secours à ses membres sans travail. Quelques temps après, la Société créa une filiale qui avait pour titre : “La Société générale des Passementiers” et dont le but était surtout d'oeuvrer pour le maintien des prix de main-d'oeuvre ou de façon.

    La création de cette nouvelle Société à base syndicale avait eu lieu à la suite de l'envoi à Lyon, de délégués des passementiers pour étudier l'organisation “mutualiste”.

    On était alors aux premiers mois de l'année, à un moment où les fabriques de rubans étaient en pleine activité. Malgré cela, les salaires étaient en baisse, les prix de fabrication variaient d'un fabricant à l'autre et des abus se produisaient dans la mensuration du travail. Aussi, les passementiers disaient : “Si nous ne voulons pas tout à fait devenir esclaves ou être entièrement avilis, il nous faut des assemblées et, par la suite, une association”.

    Dès le début de sa création, “La Société générale des passementiers” envisagea la création de bureaux de placements et le refus du travail dans les ateliers où un taux minimum de salaire ne serait pas respecté.

    Cependant, le caractère ouvrier de cette organisation amena des heurts entre les chefs d'atelier et leurs ouvriers. Les fabricants réduisaient le prix des façonnages et les ouvriers désiraient le relèvement de leur salaire. Mais, comme les chefs d'ateliers ne pouvaient pas lutter contre les fabricants qui leur procuraient du travail, ils étaient dans l'obligation de réduire les salaires. Cependant, chefs d'ateliers et ouvriers sympathisaient et comprenaient que leur ennemi commun étaient le fabricant.

    Les premières manifestations

    A la suite d'une nouvelle diminution des prix, les chefs d'ateliers, réunis dans une salle, à Badouillère, le 4 mai, nommèrent une vingtaine de syndics pour préparer un tarif de façonnage. Quinze jours après, les syndics adressèrent un projet de tarif minimum aux fabricants.

    La lettre d'envoi était d'une parfaite correction. Cependant, les autorités locales, qui jugeaient ce geste subversif, découvrirent une menace dans la phrase suivante : “Alors Messieurs, le malheur serait grand, car que répondre à nos collègues ?”. Et pourtant ces paroles exprimaient seulement un sentiment d'inquiétude bien légitime.

    Les fabricants résistaient, bien que l'un d'entre eux, nommé Granjasse (qui était des plus influents) eut montré dans une lettre que les ouvriers avaient raison de désirer un tarif fixant les prix du façonnage, tarif qui ne pouvait que cimenter le pacte d'amitié entre patrons et ouvriers.

    De son coté, le Sous-Préfet Mollard, qui craignait que cette agitation s'étendit aux mineurs, convoqua individuellement les syndics à son cabinet et leur demanda de ne pas insister sur le tarif. Ceux-ci s'inclinèrent, mais décidèrent d'utiliser un autre moyen. Ils portèrent leurs efforts sur la création de la caisse de secours, qui avait été ajournée.

    Dans une réunion, tenue le 31mai, à Montaud, ils établirent la base de la nouvelle organisation dont le caractère revendicatif était indiscutable. Les moyens à utiliser étaient la pratique de la mutualité et la pression sur les patrons.

    Pour échapper aux rigueurs de la loi, qui toléraient les groupements jusqu'à vingt personnes seulement, les sections de la nouvelle organisation étaient composées de 15 à 17 membres. Elles désignaient des délégués qui formaient des comités plus restreints. Ces comités nommaient d'autre comités jusqu'au comité central. Le prix de la cotisation mensuelle était de 1,5 franc par métier Jacquard et de 1 franc par métier à tambour.

    Dans les réunions, il était interdit de parler politique. Seules les discussions sur les questions de prix, sur l'aunage et sur la mutualité y étaient tolérées. Un mois après la création, il existait déjà quatre-vingts sections. L'organisation était terminée. La société était prête pour l'action qui ne se fit pas attendre.

    Au début du mois de juillet, un ouvrier refusa de livrer les treize aunes au lieu de douze, exigées par le fabricant Collard, premier adjoint au maire de Saint-Étienne. C'était alors la coutume que seulement les douze premières aunes fussent payées à l'ouvrier, la treizième ne l'étant pas, ce qui constituait un bénéfice pour le fabricant. Ce patron, pressé de commandes, dut céder après une grève de deux heures dans son atelier.

    Bien que le Procureur du roi eut lancé, sur la plainte de Collard, six mandats d'arrêt contre les organisateurs du mouvement, ce dernier dut signer un engagement sur la question de l'aunage avec l'ouvrier qui avait refusé de travailler sans rétribution.

    Le même cas se produisit pour un chef d'atelier qui refusait de rentrer dans l'organisation. Ses quatre ouvriers quittèrent l'atelier et le patron, nommé Dufour, qui était lui aussi conseiller municipal de Montaud, dut s'incliner.

    Enfin, en août et début septembre, les funérailles de deux passementiers permirent à la société de passer ses troupes en revue. Plus de deux mille d'entre eux y assistèrent ; ce fut une véritable mobilisation de l'organisation corporative. A ce moment, la Société prononça la mise à l'interdit de plusieurs négociants.

    Devant le développement de l'influence de l'organisation, les autorités, inquiètes, redoutaient un mouvement politique. Déjà, le préfet Bret écrivait, le 2 juillet, de Montbrison, qu'il y avait lieu d'envisager de commencer des poursuites judiciaires. Mais il y avait peu de troupes à Saint-Étienne et la Garde Nationale était peu sûre.

    De leur coté, les passementiers prenaient confiance. Dans une lettre au procureur du Roi, ils affirmaient “que ce n'est pas la troupe qui les obligeraient à travailler à bas prix et les empêcheraient de s'aider les uns les autres”.

    L'inquiétude préfectorale sur le caractère politique de l'agitation était exagérée. Le Parti Républicain, dont les deux chefs, à Saint-Étienne, étaient Faure et Caussidière, n'avait pas une grande influence sur les ouvriers.

    D'autre part, il semblait probable que les passementiers ne se lanceraient dans la bataille que si Lyon, qui avait donné l'exemple en 1831, recommencerait le mouvement.

    Des contacts eurent lieu entre les canuts et les passementiers stéphanois. Le 10 novembre, un banquet fut organisé à Givors, réunissant 150 mutualistes de Lyon, 230 de Saint-Chamond et 60 passementiers de Saint-Étienne. Au mois de novembre, une grève fut le point de départ du mouvement. Un chef d'atelier Texido, refusa d'exécuter une commande de la maison Janvier-Fontvieille qui était mise à l'index par l'organisation. La maison Janvier-Fontvieille cita Texido devant le Conseil de Prud'homme pour rupture de contrat et ce dernier fut condamné à des dommages intérêts. Finalement, une détente eut lieu. Les fabricants retirèrent leur plainte et Texido put reprendre son activité.

    C'est alors que le Sous-Préfet eut l'idée de créer une organisation indépendante des ouvriers passementiers pour les détacher de la société. Ne pouvant empêcher le développement de celle-ci, il tenta de semer la division dans la corporation en faisant poser une affiche dans laquelle il promettait la protection des lois aux ouvriers qui refuseraient de se soumettre aux règlements établis par la Caisse de Secours.

    Caussidière se servit habilement de cette affiche pour la propagande républicaine. Il publia une réponse qu'il fit distribuer aux passementiers et dans laquelle il dénonçait en termes virulents la duplicité des pouvoirs publics qui prenaient parti pour les patrons en tentant de diviser les ouvriers. D'ailleurs, l'appel du Sous-Préfet n'obtint aucun résultat et une grève eut lieu le 2 décembre à l'atelier des frères Jamet qui travaillaient pour une maison frappée d'interdit par l'Association.

    La fermentation des esprits continua jusqu'à la fin de l'année et au début 1834. Une pétition adressée au roi, le 13 novembre, sur les besoins des chefs d'atelier et des ouvriers, était restée sans effet et avait favorisé l'agitation.

    C'est alors qu'eut lieu la deuxième insurrection de Lyon.

    La grève et l'émeute de Lyon

    La baisse sur les salaires décidée par les chefs de fabrique lyonnais au début de l'année 1834 amena une grève générale des tisseurs de cette ville. Le 14 février, les trente mille métiers de Lyon cessèrent de fonctionner sur l'ordre de deux sociétés : “Le Mutualiste” et “Les Ferrandiniers”. Cette grève ne dura que quelques jours et les canuts reprirent le travail le 24 février sans avoir obtenu satisfaction.

    Mais cet échec n'avait pas abattu leur courage. Leur esprit de révolte fut ranimé par la déclaration du ministre Casimir-Perrier à la tribune de la Chambre des députés : ‘Il faut que les ouvriers sachent bien qu'il n'y a de remèdes pour eux que dans la patience et la résignation”. Leur hostilité au Parlement se trouva renforcée lors de la discussion d'une loi qui, en apparence, reconnaissait le droit d'association des ouvriers, mais qui avait en réalité pour but d'aggraver les dispositions du code pénal à leur égard.

    Le 9 avril, jour où commençait devant les tribunaux le procès des chefs d'ateliers et des ouvriers poursuivis à la suite de la grève de février, fut également celui de la cessation du travail.

    Cette grève se transforma en une insurrection qui dura six jours et se termina par la défaite des ouvriers et des républicains. Il y eut de nombreux morts et blessés et quatre cents arrestations.

    Déjà, le 19 février, quelques républicains qui chantaient “La Marseillaise” se trouvèrent aux prises avec la police qui leur signifia d'avoir à se disperser. Le lendemain, la foule se réunit dans la rue et entonna l'hymne de Rouget de Lisle. La police intervint et des manifestants furent arrêtés. On voulut les incarcérer mais, devant la prison, leurs camarades tentèrent de les délivrer.

    Une violente bagarre éclata. Plusieurs manifestants furent blessés à coup de baïonnette, ainsi qu'un commissaire de police ; un agent fut tué d'un coup de couteau. Une centaine d'arrestation eurent lieu par la suite.

    Parmi les personnes arrêtées se trouvait Caussidière, le chef des républicains stéphanois qu'on essaya de rendre responsable du décès de l'agent. Caussidière eut d'ailleurs une attitude courageuse. Dans une lettre qui fut publiée quelques jours après, il revendiqua la responsabilité d'avoir organisé la manifestation pour protester contre l'interdiction du chant “La Marseillaise”. Il déclara également que les manifestants avaient eu raison de se défendre contre les brutalités de la police.

    Les journaux de l'époque exploitaient ces incidents pour défendre la royauté contre ceux qu'ils nommaient “Le Parti du désordre”. De son coté, le Préfet publia un appel aux habitants de Saint-Étienne les invitant à être calmes et à ne pas troubler l'ordre.

    Les suites de l'émeute

    Le mouvement avait avorté et les passementiers stéphanois ne purent, malgré leur désir, rejoindre leurs camarades lyonnais. Les jours suivants, on fit le bilan de l'émeute : cinq morts chez les manifestants et un soldat tué. Les blessés se comptaient par dizaines. Plus de cent réverbères, deux magasins et plusieurs guérites de soldats avaient été détruits. Plus de cent arrestations eurent lieu et de nombreuses condamnations furent prononcées par les tribunaux.

    Le Préfet suspendit la garde nationale qui n'avait pas voulu lutter contre les manifestants. Il exigea que tous les gardes rendent leur fusil. Environ 2400 seulement, sur 3800 s'exécutèrent.

    A Saint-Étienne, comme à Lyon, ce furent surtout les corporations ouvrières qui organisèrent les journées d'avril ; il n'en fut pas de même à Paris, Grenoble ou Marseille. Le Gouvernement voulait voir dans cette affaire un complot politique organisé par la Société des Droits de l'Homme qui groupait les républicains. Une instruction fut ouverte à ce sujet et deux mille arrestations furent opérées en France. Les chefs mutualistes de Lyon et de nombreux ouvriers furent poursuivis.

    La mobilisation de la classe ouvrière stéphanoise ne s'arrête pas là. Viendront ensuite des mouvements tout aussi violents et durement réprimés en particulier dans le textile et les mines [1]. Nous vous renvoyons aux articles déjà publiés sur ces sujets dans nos cahiers. [2]


    [1] Les passementiers avaient d'autres raisons pour s'unir : la déloyale concurrence du tissage de la soie et la passementerie dans les couvents. Malgré une suspension décidée par le maire, accompagnée de mise sous scellés des métiers, la mesure est levée par le juge le 14 mars 1848 sous la pression des fabricants et de la Directrice du “Pieux Secours” qui avait accepté les scellés à la condition que les autorités prennent en charge les cent quarante orphelines accueillies dans le couvent.
    La reprise des activités industrielles dans les couvents entraîna une mobilisation croissante des passementiers. Les 13 et 14 avril 1848 des expéditions punitives contre les couvents s'organisent. C'est au cours de ces journées que les établissements du Pieux Secours (couvent de la Reine) rue de la Paix, le Refuge la Providence rue de Foy, de la Sainte Famille, rue de l'île, furent pillés, incendiés.

    [2] Voir Cahier n°48 mai 1999 article de Claude Cherrier : “La fusillade du Brûlé 16 juin 1869" et Cahier n°63 mars 2003 article d'Alain Bujard “Les ouvrières enfermées. Les couvents soyeux”.